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Sermon de Mgr le Prieur Général,
le 8 décembre 2010 en la fête de l’Immaculée-Conception

 

Monsieur le Supérieur,

Messieurs les chanoines,

Ma très révérende Mère,

Chers séminaristes,

Chères sœurs,

Mes bien chers frères,

 

Nos Constitutions nous disent :

« L’Institut reconnaît et vénère comme Patronne principale la Bienheureuse Vierge Marie, invoquée sous le titre de son Immaculée Conception, car Elle a gardé en son sein le Verbe de Dieu pour le donner au monde, comme le donnent les membres de l’Institut par leur Sacerdoce et leur Engagement. »

En effet, dès que Marie prononça son « fiat », elle devint le tabernacle du Verbe Incarné. Le premier donc, et le plus précieux des tabernacles de Jésus.

Et si l’on remarque que ce « fiat », dans le texte grec, est à l’aoriste (temps de la conjugaison grecque qui répond à notre passé défini, je fus, je fis) et non au présent, la réponse de Notre-Dame se colore, peut-être en raison de l’indétermination de ce temps, d’une nuance délicate d’abandon, comme si Marie s’en était remise à la divine Volonté pour le choix du moment de Dieu. Grand abandon, grande docilité de la part de Marie !

Puisque les dispositions spirituelles que Dieu voulait trouver en Marie pour descendre en son sein étaient maintenant présentes avec toute la perfection désirable, c’est l’action toute puissante du Saint-Esprit qui alors devait opérer et faire d’elle la Mère de Jésus.

Et voilà que le grand Mystère s’accomplit. L’évangile nous en donne positivement l’assurance puisqu’il nous dit que Marie fut saluée par Sainte Élisabeth comme Mère de Jésus au début d’une visite qu’elle lui fit « In diebus illis », en ces jours-là.

Aux solennelles paroles du « fiat » de Marie, font écho les sublimes paroles de saint Jean qui leur correspondent « et le Verbe s’est fit chair » ; qui avec la même concision, expriment elles aussi l’accomplissement du divin prodige, l’accomplissement de l’Incarnation du Verbe dans le sein très pur de Marie.

La vraie Lumière dont parle saint Jean, était descendue dans le monde ; bien plus importante que la lumière naturelle qui brille dans la Création. Pour celle-ci, il fallut le« fiat » du Créateur ; pour celle-là, le « fiat » du consentement de Marie.

Oui, nous considérons Dieu comme source de l’ordre naturel, à savoir la Création proprement dite, la conservation et le mouvement des êtres. Il est aussi, et cela doit nous toucher davantage, la source de l’ordre surnaturel ; ordre qu’Il a daigné restaurer après le péché originel avec munificence par le moyen du Précieux Sang de son divin Fils, incarné pour nous dans le sein virginal de Marie.

Il est clair que plus le don est grand, dans l’un ou l’autre de ces ordres, plus devra être étroit le lien très doux de la divine appartenance. Or quelle créature a été plus richement comblée de dons que la Sainte Vierge, l’Immaculée, le chef-d’œuvre de la Création ?

Pourtant ses grandeurs n’échappaient en aucune manière à l’œuvre rédemptrice du Christ puisqu’il est de foi catholique qu’elles furent toutes accordées en prévision des mérites de Jésus, Sauveur du genre humain.

La Trinité, dans son plan divin, devait donc protéger la Sainte Vierge contre toute souillure, même originelle.

Le Cœur de Marie devait devenir le sanctuaire mystérieux où le Saint-Esprit devait descendre et se reposer « Spitritus Sanctus superveniet in te ». C’était le jardin fermé : « ortus conclusus », la fontaine scellée : « fons signatus » dont il est question dans l’Écriture. Il n’était donc pas admissible, bien chers amis, alors qu’Il pouvait l’empêcher, que le Saint-Esprit ait permis que le démon souilla le lit virginal où devaient se célébrer ses noces mystiques, le temple où Il devait faire sa résidence préférée, le cœur dans lequel Il devait entasser les plus admirables trésors de grâces et de bénédictions. Il ne devait pas seulement descendre en Marie et habiter en elle, Il devait encore la couvrir de son ombre et la rendre mère de par sa divine et chaste Vertu.

Il y a eu entre eux des liens étroits et sacrés, une ineffable union. Il n’était pas possible qu’au moment où il prendrait, dans le sein tout pur de la Sainte Vierge, le sang destiné à former le corps du Sauveur, le démon put lui dire : « il y a eu un jour où celle que tu épouses fut mon esclave ». Non, la Trinité a protégé la Sainte Vierge, Elle a voulu faire de Marie la « nouvelle Éve », nom si souvent donné à Marie par les Pères de l’Église, pour en faire la mère de Dieu, la co-rédemptrice du genre humain, la reine du Ciel. Chacun de ses titres, voyez-vous, exige une conception immaculée.

Écoutons le bienheureux Pie IX, lorsqu’il proclame solennellement le dogme de l’Immaculée Conception dans l’immortelle bulle Ineffabilis Deus : « Nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine qui affirme que la Bienheureuse Vierge Marie a été dans le premier instant de sa conception, par une grâce singulière et un privilège insigne du Dieu Tout-Puissant, et en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du Genre humain, préservée et totalement exemptée de la tâche du péché originel est une doctrine révélée et que par conséquent elle doit être fermement et constamment crue par tous les fidèles. ».

Aujourd’hui, chers prêtres, chers séminaristes, mes très chères sœurs, chers fidèles, il nous est donné de contempler et d’exalter cette merveilleuse préservation de tout péché, de toute souillure dont Notre-Seigneur Lui-même a entouré sa Mère. Tout ce que l’amour le plus ingénieux peut imaginer, tout ce que la puissance la plus illimitée et la plus féconde peut produire, Il l’a fait pour écarter jusqu’à l’ombre d’une souillure, jusqu’à l’apparence d’une faiblesse, jusqu’au simple soupçon d’une imperfection de la femme prédestinée que les générations devaient proclamer bienheureuse.

Ah mes chers amis, rendez-vous compte, on ne saurait imaginer ni soin plus attentif, ni protection plus efficace, ni sollicitude plus affectueuse.

Dans l’âme bénie de la Sainte Vierge, il n’y a eu que pureté, grâce, rectitude et charme. L’approche de ce sanctuaire, que Dieu s’était consacré dès l’origine des temps, a été rigoureusement, si j’ose dire, interdit au diable, à ses démons, au péché, à l’ombre du péché, mais encore à la concupiscence et à l’erreur.

Vous aurez remarqué que ceux qui attaquent la Vierge Sainte ne savent pas de quoi l’incriminer. En effet, on a beau chercher, on ne peut y découvrir autre chose qu’une souveraine sainteté. Au milieu des fanges de la vie, Marie a grandi toujours immaculée, comme éclatante de blancheur. Tel le lys qui a grandi parmi les épines, aucune tâche n’est venu ternir la splendeur de sa virginale beauté. Les lois les plus inexorables ont fléchi pour elle. Pour elle, le Ciel a fait revivre les prérogatives oubliées de l’intégrité de nature ; et dans toute cette existence, il est impossible de rien trouver dont puisse se glorifier le démon et dont doive rougir le Verbe.

Celle qui est arrivé à la vie parée de délicesbrillante comme l’auroreresplendissante comme le soleil, demeure jusqu’au bout plus belle que les astres et plus pure que la lumière « Nihil inquinatum in eam incurrit. Candor est lucis aeternae et speculum sine macula. Est enim haec speciosor sole et luci comparata invenitur purior. » : « Rien ne vient la souiller. Elle est l'éclat de la lumière éternelle et le miroir sans tache. Elle est plus belle que soleil ; et comparée à la lumière, elle sera trouvée plus pure », comme nous l’avons lu ce matin à Matines.

Marie, quant à elle, avait sûrement bien conscience de cette surabondance des dons divins. Mais cela ne faisait que rendre plus vif son sentiment d’amoureuse soumission envers Dieu.

Puisque personne n’appartenait à Dieu et ne dépendait de Lui autant qu’elle ; personne non plus, n’avait autant qu’elle conscience d’appartenir et de dépendre. Et c’est pourquoi aucune bouche humaine ne profèrera jamais avec autant de lumière profonde et autant d’ardent amour que Marie ces paroles : « Voici la servante du Seigneur » ; paroles manifestants cette appartenance totale à son Seigneur. D’ailleurs, le mot qu’elle emploie se traduirait plus facilement par esclave que par servante, qui veut dire parfaite disponibilité, sans aucune réserve.

Si cet esclavage aux yeux des hommes pouvait passer pour une humiliation terrible ; aux yeux de Dieu, il était le plus haut titre de noblesse. Devant la volonté expresse de son Seigneur, la servante, celle qui est toute disponibilité, ne peut qu’obéir sans réserve. Notre-Dame prononce donc le « oui » de la parfaite acceptation, réparant ainsi le « non » prévaricateur d’Ève. Et elle emploie pour cela d’autres mots, et les plus appropriés qui soient pour exprimer son attitude d’obéissance : « qu’il me soit fait selon votre parole ».

 

« L’Institut reconnaît et vénère comme Patronne principale la Bienheureuse Vierge Marie, invoquée sous le titre de son Immaculée Conception, car Elle a gardé en son sein le Verbe de Dieu pour le donner au monde, comme le donnent les membres de l’Institut par leur Sacerdoce et leur Engagement. »

Oui, nous aussi, à la suite de Marie, nous devons répondre à l’appel du Seigneur, à cette vocation particulière qui est celle de transmettre le Christ aux autres et de propager sa royauté !

Oui chers amis, nous avons été choisis par Dieu - certains pour leur oblature, d’autres pour leurs vœux et d’autres pour le sacrement de l’ordre - et mis à part pour un jour recevoir l’onction sainte. Le Saint-Esprit transformera votre être tout entier pour qu’il reproduise le Christ sur terre. Écoutez chers séminaristes ce que dit le Pontifical romain et rappelez-vous, chers prêtres, ce que vous avez entendu lors de votre ordination. Tout d’abord dans la préface consécratoire :

« Da, quæsumus, omnipotens Pater, in hos famulos tuos Presbyterii digniitatem; innova in visceribus eorum Spiritum sanctitatis; ut acceptum a te, Deus, secundi meriti munus obtineant, censuramque morum ex exemplo suæ conversationis insinuent. » : « Nous vous en supplions, Père tout-puissant, donnez à vos serviteurs, la dignité du sacerdoce ; renouvelez en leurs cœurs l’Esprit de sainteté, afin qu’ils soutiennent avec honneur ce ministère que vous leur avez confié, et qu’ils censurent les mœurs du siècle par l’exemple de leurs vertus. ».

Et à la fin de la cérémonie, le pontife bénit encore une fois en disant : « Benedictio Dei omnipotentis Pa + tris, et Fi + lii, et Spiritus + Sancti descendat super vos ; ut sitis benedicti in ordine sacerdotali ; et offeratis placabiles Hostias pro peccatis, atque offensionibus populi omnipotenti Deo, cui est honor, et gloria per omnia saecula saeculorum. » : « Que la bénédiction du Dieu tout-puissant, Père, Fils et Saint-Esprit, descende sur vous ; afin que vous soyez, bénis dans l’ordre sacerdotal, et que vous offriez, pour les péchés et les offenses du peuple, des hosties agréables au Dieu tout-puissant, à qui revient honneur et gloire pour les siècles des siècles. ».

Paroles graves, paroles divines. Nous sommes en effet, frères très chers, appelés. Nous avons reçu ou nous recevrons l’Onction Sainte, nous allons ou avons prononcé nos vœux et nos engagements sacrés ; mais dans tous les cas nous avons prononcé notre « fiat ». Nous avons accepté que le Saint-Esprit opère en nous de grandes choses, mais malheureusement, il est si souvent entaché d’imperfections. Nous sommes bien loin de la générosité, de l’abandon, de la sainteté de Marie. Et bien là, il n’y a qu’un seul remède : recourir à la Mère du Sacerdoce, l’implorer, lui demander son aide et sa bienveillante protection. Priez-la souvent, tous les jours, et plusieurs fois dans la journée ! Vous avez des difficultés, des tentations, priez-vous bien tous les jours le chapelet ? Invoquez-vous Marie humblement et avec persévérance ?

Marie est là, toujours présente devant la face de Dieu, avec ses mérites très singuliers. Elle intercède continuellement pour nous d’une prière toute puissante. Éclairée par cette lumière pour laquelle tout est à découvert, elle voit bien mieux que personne tous nos périls, toutes nos nécessités ; et d’un cœur doux et clément, elle nous regarde avec pitié. Elle voit nos travaux, elle voit nos bonnes résolutions, elle voit nos souffrances, nos chutes, nos aveuglements, nos obstinations, nos maladies, nos épreuves, tous les maux qui pèsent sur nous. Alors croyez-moi, elle plonge profondément son regard dans le cœur du Roi des rois ; mieux encore, elle sait par la grâce de la divine bonté regarder d’un œil compatissant les affligés et porter secours aux malheureux.

Je pense que nous tous ici, nous n’en doutons point. Elle a tellement fait pour notre cher Institut. Et voyez-vous, pour nous faire une idée de l’affectueux intérêt et du dévouement sans borne que la Sainte Vierge nous porte, il est inutile d’aller chercher des preuves bien loin ; que chacun d’entre-nous descende au fond de lui-même et fasse appel au témoignage de sa conscience. Elle nous dira que nous n’avons jamais fait en vain appel à la tendresse de notre toute bonne et toute puissante Mère ; que chaque fois que nous l’avons appelée à notre secours, nous avons trouvé en elle soulagement dans nos peines, lumière dans nos doutes, courage et résignation dans nos épreuves, appui dans nos luttes, assistance dans nos dangers, aide et protection dans tous nos besoins. C’est par elle qu’il nous faut obtenir de Dieu de répondre toujours plus généreusement à la vocation particulière qu’Il nous a donnée. C’est à elle qu’il nous faut recourir. Et c’est ce que nous faisons pieusement par cette Consécration tous les ans le 8 décembre et que nous renouvelons tous les jours ; comme Bossuet nous affirmons : « que pourrait refuser un fils à sa mère, surtout à une mère si tendrement aimée et si sainte ». Nous avons à Gricigliano, voyez-vous, la certitude d’être favorablement écoutés toutes les fois que nous nous adressons à l’Immaculée Conception.

« Ne me dites pas, s’écriait saint François de Sales, gracieuse Vierge, que vous ne pouvez, car votre bien aimé Fils vous a donné toute puissance, tant au ciel comme en la terre. Ne me dites pas que vous ne devez, car vous êtes la commune mère de tous les pauvres humains et singulièrement mienne. Si vous ne pouviez, je vous excuserais, disant : il est vrai qu’elle est ma mère et me chérit comme son fils, mais la pauvrette manque d’avoir et de pouvoir. Si vous n’étiez ma mère, avec raison je patienterais, disant : elle est bien assez riche pour m'assister ; mais, hélas ! n'étant pas Mère, elle ne m'aime pas. Puis donc, très douce Vierge, que vous êtes ma Mère, et que vous êtes puissante, comment vous excuserai-je si vous ne me soulagez et ne me prêtez votre secours et assistance ?

Voyez, ma Mère, et voyez que vous êtes contrainte de m'accorder et d'acquiescer à toutes mes demandes. »

Faisons nôtre cette belle prière de saint François de Sales.

Ainsi soit-il.