ICRSP

 

 Sermon prononcé par M. l'abbé Paul Antoine Lefèvre, Vice-Recteur.

 

FÊTE DE SAINT THOMAS D’AQUIN

LE 7 MARS 2000

 

 

Le glorieux saint Patron que nous fêtons aujourd’hui est né vers 1225 dans cette terre bénie de l’Italie au château paternel de Rocassecca près de Naples.

Fils de Landolphe, comte d’Aquin, et de Théodora de Naples, Thomas fut élevé par ses parents dans la discipline et la charité chrétienne qui illustraient depuis des siècles la noble famille.

Ce fut cette éducation soignée qui lui permit d’édifier sa vie spirituelle et intellectuelle sur le solide fondement d’une nature fortifiée par l’acquisition des vertus morales.  Cette éducation fut parachevée par les bons moines bénédictins du Mont Cassin. Là au milieu des religieux, le jeune enfant fut formé au devoir de la piété filiale envers Dieu, il apprit dès son jeune âge ce qu’il nommera la dévotion; c’est-à-dire:

« une volonté de se livrer promptement à ce qui concerne le service et le Culte divin » « en vouant à Dieu toute notre personne dans un assujettissement total. » IIa, IIae, q. 82,a.1 . Parmi les bénédictins qui pendant de longs siècles furent les seuls éducateurs des peuples d’Occident, notre saint appris dès son plus jeune âge la perfection morale dans le respect de la primauté du culte divin, primordialement latreutique et contemplatif.

Cette piété envers Dieu, l’enfant jamais ne la perdit. Toute sa science s’enracinait dans un cœur totalement épris de l’Amour et de la Gloire de Dieu. Dès 1239, il est à l’Université de Naples pour l’initiation à la philosophie avec les Arts libéraux. A Naples, notamment, avec le Trivium, saint Thomas assimile la totalité de l’organon aristotélicien qui lui permettra une grande rigueur de pensée et de formulation. [1] Avec docilité, bienveillance et attention [2] , de 14 à 18 ans, il reçoit en cette ville, l’héritage de la pensée antique des philosophes. C’est à Naples également qu’il fait le choix de l’Ordre dominicain et prend l’habit blanc, vraisemblablement en 1244.

Ayant bien d’autres projets pour son fils, sa mère Théodora se rendit alors à Naples en toute hâte dans la ferme résolution de le dissuader, mais elle arriva trop tard. La comtesse le poursuit jusqu’à Rome où, là encore, le jeune frère Thomas est déjà reparti avec le Maître Général, Jean le Teutonique.

Pour rester fidèle à sa vocation, saint Thomas résiste invinciblement à toute sa famille, c’est en vain qu’il est pris manu militari par ses frères de sang et reconduit auprès de sa mère, c’est en vain qu’on le maintient de force dans le château de famille; c’est en vain qu’on s’efforce de le faire chuter en son vœu de chasteté et de lui tenir des mois durant le discours de la sagesse du monde.

  Plus tard, dans la Somme théologique, saint Thomas nous laissera une pensée bien définie sur les éventuels problèmes concernant l’avis défavorable des parents en matière de vocation : Je cite: « Quand les parents ne sont pas dans une situation telle (dit -il) qu’ils aient sérieusement besoin de l’assistance de leurs enfants, ceux-ci peuvent abandonner le service de leurs parents et entrer en religion, même contre leur défense. Parvenu à l’âge de la puberté, quiconque est de condition libre, a le droit de disposer de lui-même dans le choix d’un état, surtout s’il s’agit du service de Dieu:   nous devons, pour vivre, plus d’obéissance  au Père des esprits (He XII,9) qu’aux générateurs de notre chair. » IIa IIae, q. 189, a.6

 

De 1245 à 1252, saint Thomas est disciple, puis assistant de saint Albert le Grand: à Paris tout d’abord, puis à Cologne.

Comme étudiant, il sut pratiquer pour lui-même les conseils qu’il donnait à toute âme désireuse d’acquérir le trésor de la sagesse:

- il était lent à parler et aimait le silence de sa cellule;

- il fuyait les conversations inutiles et ne fut jamais curieux des actions d’autrui.

- Le bon frère Thomas était aimé de tous, mais ne fut jamais trop familier, car l’excès de familiarité (disait-il) engendre le mépris.

C’est très probablement à Cologne que notre saint reçu l’Ordination sacerdotale vers l’âge de 24, 25 ans.

 

Auprès de saint Albert, Thomas devient bachelier biblique puis bachelier sentenciaire [3] . C’est en ces premières années qu’il nous laisse une bonne partie de ses commentaires scripturaires.

« En préparant ses cours d’Ecriture Sainte, saint Thomas prend du temps pour ruminer et se pénétrer des Paroles divinement inspirées.

Dans son commentaire du chapitre 48ème d’Isaïe, il enseigne que « La parole de Dieu est utile pour:

- illuminer l’intelligence

- réjouir la sensibilité

- enflammer le cœur

- instruire les autres

-     - obtenir la gloire.

Jamais notre bienheureux saint Patron ne négligera d’entretenir sa dévotion par la lecture des livres saints et des Pères de l’Eglise.

On connaît à ce propos le mot fameux de Cajetan repris par l’Encyclique Aeterni Patris: « Pour avoir assidûment cultivé les saints Docteurs qui l’ont précédé, il a, en quelque sorte, hérité de l’intelligence de tous. »

 

En 1256, le chancelier de l’Université lui accordait la Licentia docendi et lui ordonnait de se préparer à prononcer sa leçon inaugurale. Saint Thomas n’avait alors que 31 ou 32 ans. Il aurait préféré esquiver la charge, mais il est contraint par l’obéissance et ne peut se dérober. Il se mit donc en prière avec beaucoup de larmes; et dans la nuit qui suivit, un frère dominicain lui apparut en songe pour lui proposer le sujet de son discours. Au moment où saint Thomas accepte la charge de Maître, « On était en plein dans la guérilla déclenchée par les maîtres séculiers contre les maîtres mendiants... » Pour rester le serviteur de l’Eglise dans l’enseignement et la publication de ses travaux, saint Thomas prend soin de rester autant qu’il le peut à l’écart de ces querelles. Cependant, lorsqu’un Guillaume de Saint-Amour ou un Gérard d’Abbeville vont jusqu’à remettre en question la légitimité de l’existence même des Ordres mendiants, saint Thomas sait  prendre sa plume pour défendre l’honneur de son Ordre et montrer qu’il n’est pas un intellectuel timoré.

 

Le contra impugnantes est resté célèbre et la finale du De perfectionis vaut la peine d’être citée : « Si quelqu’un (nous dit Thomas) souhaite écrire contre cet ouvrage, cela me sera très agréable (acceptissimum); en effet la vérité ne se manifeste jamais mieux qu’en résistant à ceux qui la contredisent et en réfutant leur erreur. » De perfectionis (chap.30) [4]

 

La conclusion du Contra retrahentes n’est pas moins ferme: « Si quelqu’un voulait contredire cet ouvrage, qu’il n’aille pas babiller devant des gamins, mais qu’il écrive un livre et le publie afin que les gens compétents puissent juger ce qui est vrai et réfuter ce qui est faux par l’autorité de la vérité. » Contra retrahentes (chap.17) [5] Saint Thomas en cheminant dans sa quête de la sagesse contemplative connaît une union de charité avec Dieu de plus en plus grande.

Dans sa vie intellectuelle, sa sagesse spéculative (philosophique et théologique) ne s’est jamais séparée de la sagesse mystique infuse donnée par le Saint-Esprit.

Sa contemplation augmentait son amour de Dieu et son amour de charité lui donnait une connaissance de Dieu par connaturalité de plus en plus savoureuse. Mieux, sa recherche de l’intelligibilité des réalités naturelles et surnaturelles étaient en vue de l’amour de Dieu.

  Dans son traité des vertus théologales, saint Thomas n’hésitera pas à soutenir l’existence d’une relation d’amitié entre Dieu et l’homme par la Charité. Pour notre saint docteur, la charité est en effet un amour d’amitié par lequel Dieu se fait connaître et se communique à nous, en nous faisant partager son bonheur infini. « Dans l’amour d’amitié, l’aimant est dans l’aimé, en ce sens qu’il considère les biens ou les maux de son ami comme siens, et la volonté de son ami comme la sienne propre... » Ia, IIae q.28, a.2 . Ainsi, conformément à sa doctrine de l’amour, toute sa vie, saint Thomas fut cet amant de Dieu tout entier dans l’Etre aimé. C’est en cette union de l’amour divin, près du cœur de son Maître, que saint Thomas puisa toute sa science. Avec le saint Docteur commun, toute la philosophie était ordonnée à la Théologie et toute la théologie orientée à la dilection de la charité. (Cf. In Cant., prooemium et c.1)

Jamais en sa vie d’enseignant, son érudition de provoquait le dessèchement de l’âme parce que toujours en son intelligence, la science était causée par l’amour et retournait à cette source divine suivant le mouvement bien connu de l’exitus et du reditus. L’impulsion de tout son labeur fut la charité, son amitié intime avec son Maître, Notre Seigneur Jésus Christ. La clarté de son discours provenait elle aussi de sa charité car c’est pour être compris et transmettre des vérités à contempler que saint Thomas enseignait, non pour satisfaire un vain désir de paraître en se gargarisant de néologismes pédants. C’est près du tabernacle que saint Thomas se trouvait avant et après ses cours; c’est là suivant sa confidence propre qu’il parvenait à résoudre les questions les plus difficiles. C’est là, dans une oraison pleine d’amour qu’il vivifiait et unifiait son étude. C’est cette activité vitale de son intelligence éclairée directement par l’Esprit-Saint qui explique le prodige surhumain de sa doctrine: l’ampleur et la profondeur de sa pensée. Cet amour de Dieu puisé au pied du tabernacle lui valut sa singulière pureté et les Pasteurs de l’Eglise lui ont donné le non de docteur angélique pour cinq raisons:

1) Premièrement: à cause de son angélique pureté et de l’absence totale de tout sentiment de passion impure après sa victoire célèbre au château de Rocassecca et l’apparition des anges le ceignant du cordon mystérieux.

- Docteur angélique, Thomas le fut en vérité,

parce que, comme les anges, saint Thomas excella: par l’éclat virginal, par une intelligence inondée de lumière et une volonté immuablement affermie dans le bien.

2) Docteur angélique, Thomas le fut en vérité,

parce que, comme le disent les Carmes de Salamanque, si, par possible, Dieu commandait à un ange de s’incarner, et de penser à la manière humaine (per conversionem ad phantasmata), en composant, divisant et discourant; cet ange ne penserait pas avec plus de rapidité, de subtilité et de perfection que saint Thomas; ...

3) Docteur angélique, Thomas le fut en vérité,

parce que, tout en demeurant dans le corps et sur la terre, spirituellement, il était dans le ciel et vivait avec les anges; très fréquemment ravi en extase selon le témoignage de son ami le frère Réginald de Piperno.

4) Angélique aussi, parce qu’il a écrit des anges angéliquement et qu’il a dépeint leur nature, leur distinction, leurs hiérarchies, leurs puissances et leurs états comme s’il les avait vus ou comme s’il était un ange. [6]

Sa grande pureté, nous pensons que saint Thomas la puisa aussi dans son amour pour les trois blancheurs:

La blancheur de l’Hostie immaculée,

La blancheur de la pureté virginale de Marie.

La blancheur de la Papauté dont il était le fidèle serviteur chaque jour de sa vie.

Vers 1264, le Pape Urbain IV demande à saint Thomas de composer l’Office du saint Sacrement. C’est à Orvieto que saint Thomas s’appliquera avec toute son ardeur à obéir à cette demande du Pape.

Le fruit de sa prière et de son travail nous est bien connu. Dans les hymnes de la Corpus Domini, passent un souffle de foi et de charité qui nous révèle l’immense dévotion que saint Thomas avait pour ce sacrement.

Pie XI lui-même écrira dans son Encyclique Studiorum ducem que notre Docteur par ses prières et hymnes liturgiques « est devenu le poète et le héraut le plus grand de la divine Eucharistie. »

Par la seule antienne O sacrum convivium, nous avons le plus merveilleux condensé de la théologie eucharistique.

Sur tous les points de la terre, l’Eglise catholique chante les cantiques du grand Docteur eucharistique avec le Pange lingua, le Lauda Sion, l’Adorote devote et chaque prêtre de l’Eglise universelle est convié à se préparer à la Messe avec la prière Omnipotens sempiterne Deus, puis à réciter son action de grâces avec la prière Gratias tibi ago.

 

« lex supplicandi statuat legem credendi »: « Que la règle de la prière fixe la règle de la croyance. » [7] : cet adage bien connu se vérifie particulièrement avec les prières de saint Thomas.

En ce jour de sa fête, nous avons plaisir à nous représenter combien dû être grande la ferveur du saint docteur lorsqu’il célébrait les saints mystères à l’autel. Avec une telle intelligence de ces mystères et une telle beauté expressive de sa dévotion propre, nous supplions aujourd’hui notre bien aimé saint Patron de nous communiquer un peu de son brûlant amour pour ce sacrement.

Dans sa Somme, saint Thomas exprimera la raison d’être de sa tendre vénération pour ce sacrement:

« Ce qui est le propre de l’amitié, (dit-il) c’est de vivre avec ses amis...et c’est pourquoi le Christ nous a promis sa présence corporelle en récompense, [au ciel]...Mais en attendant, il n’a pas voulu nous priver de cette présence corporelle durant notre pèlerinage, [et ainsi] par la vérité de son corps et de son sang, il nous joint à lui dans ce sacrement ... »

L’Eucharistie est donc « le signe du plus grand amour et le réconfort de notre espérance en raison de cette si intime union au Christ. » IIIa, q.75, a.1

Après la consommation du sacrifice, Thomas prolongeait dans l’action de grâces le bonheur qu’il avait éprouvé dans l’Oblation, et d’ordinaire - nous dit son biographe Guillaume de Tocco - saint Thomas aimait en son action de grâces servir un autre prêtre à l’autel.

Il nous a laissé son admirable doctrine eucharistique dans la Somme théologique; mais il nous sera également très profitable de ne pas négliger la lecture de deux des ses opuscules en la matière:

- l’Opuscule 64ème sur le de Officio Sacerdotalis et l’Opuscule 65ème qui est une très belle explication des prières de la Messe où là encore, c’est toute l’âme sacerdotale du saint qui s’exprime pour tous ses fils spirituels.

Dans le De Officio sacerdotalis, saint Thomas rappelle entre autre,

- la nécessité d’une église pour la célébration des saints Mystères;

- la grande convenance pour le prêtre de préparer lui-même son Calice pour la Messe;

- la nécessité de la pierre d’autel, de la consécration du calice

- la nécessité de l’attention et de la dévotion pour « ne pas se tromper, ne pas se répéter, ne pas manquer de respect dans la prière publique.

- la nécessité (si c’est possible) de s’abstenir de dire la messe si l’on a pas toutes les dispositions requises... etc.

 

La Dévotion du serviteur pour Notre Dame s’exprime parfaitement dans sa prière à la sainte Vierge:

« O très bienheureuse et très douce Vierge Marie, Mère de Dieu, très pleine de toute bonté, fille du souverain Roi, reine des anges, Mère de tous ceux qui croient dans le sein de votre miséricorde; aujourd’hui, tous les jours de ma vie, je dépose mon corps, mon âme, tous mes actes, pensées, volitions, désirs, paroles, actions, ma vie toute entière et ma fin. Que par vos suffrages tout soit ordonné au bien selon la volonté de votre bien-aimé Fils, Notre -Seigneur Jésus Christ.. » (Sancti Thomae, Monita et preces; éd. Esser, O.P.) [8] La dévotion de docteur pour la blancheur papale, saint Thomas l’a manifesta en restant tous les jours de sa vie, le très humble serviteur de l’Eglise dans une fidélité indéfectible envers tous ses supérieurs. Ces milliers de kilomètres à travers l’Europe de Naples à Cologne, de Cologne à Paris, de Paris à Orvieto, de Orvieto à Perugia, puis Roma, Viterbo, Anagni, Todi et Lucca. Ses allées et venues entre la France et l’Italie; tout ce temps passé sur les routes, toutes ses fatigues durant ses longs voyages; toutes ses veilles sur son bureau de travail pour satisfaire les demandes qui lui arrivaient du monde entier. Tout cela fut fait dans la plus parfaite obéissance à ses supérieurs. Et c’est encore une grâce à demander aujourd’hui: puissions-nous ressembler à saint Thomas au moins par le désir d’être obéissant, jours après jours, avec persévérance dans l’accomplissement du devoir d’état qui nous a été confié. C’était cela aussi le secret de sa sainteté: être là chaque jour où ses supérieurs le souhaitaient: dans le renoncement total à ses désirs propres, dans un dépouillement de soi-même joyeux, et sans retour sur soi; sans jamais tirer orgueil de son état de perfection où il se trouvait par vocation.

 

En 1274, c’est encore par obéissance et parce qu’il était héroïquement serviteur de l’Eglise qu’il partit pour Lyon où devait se tenir le 14ème Concile oecuménique. Accompagné par frère Réginald de Piperno et frère Jacques de Salerne, saint Thomas partit sur le champs malgré son extrême fatigue. Mais le serviteur de Dieu arrivait à la fin de son mission terrestre. Il fut trop fatigué pour poursuivre sa route. Exténué, il fut contraint de s’arrêter. Prévoyant sa fin proche, il demanda à ce qu’on le transporta chez les fils de saint Benoît où il avait commencé sa vie de prière dès l’âge de 5 ans. Dans l’abbaye de Fossanova, après le viatique, saint Thomas se leva, se prosterna et au milieu de ses larmes déclara: « Je te reçois, prix de mon salut; pour ton amour, j’ai étudié, veillé, travaillé; je remets au jugement de la Sainte Eglise tout ce que j’ai enseigné ou écrit sur le Sacrement  du Corps du Christ et les autres sacrements. » Le jour suivant, il reçut l’Extrême Onction, répondant lui-même aux prières: et le lendemain 7 mars 1274, très tôt le matin, il rejoignit le Bien-Aimé.

Le 18 juillet 1323, saint Thomas est glorieusement canonisé en Avignon par le Pape Jean XXII. [9]

En 1567, saint Pie V (1566-1572) proclame Thomas ‘Doctor ecclesiae’.

En 1594, Clément VIII demande aux jésuites d’adhérer, eux aussi, à la doctrine de saint Thomas.

Le 4 août 1879, par son encyclique Æterni Patris, le Pape Léon XIII [10] enseignait que Thomas « entre tous les Docteurs scolastiques, brille, d’un éclat sans pareille » pour être « leur prince et maître » ; « le défenseur spécial et l'honneur de l'Église » [11]

En 1880, Léon XIII proclame la nécessité de l’étude de la philosophie de saint Thomas. La même année, il institue saint Thomas, patron universel des écoles catholiques.

En 1907, le Pape saint Pie X impose l’enseignement de saint Thomas dans les séminaires. [12]

En 1923, Pie XI dans son Encyclique « Studiorum ducem » écrit : « Le guide des études que doit suivre la jeunesse, est Thomas d’Aquin. »

En 1950, Pie XII rappelle l’attachement de l’Eglise à la doctrine et aux principes du Docteur angélique.

En 1962, le Concile Vatican II, dans la déclaration Gravissimum Educationis [n°10] demande que « l’on marche sur les traces des docteurs de l’Eglise et particulièrement de saint Thomas d’Aquin. »

Le 14 septembre 1998, dans l’Encyclique Fides et ratio, le Pape Jean Paul II affirmait : [78] : « le Magistère a loué maintes fois les mérites de la pensée de saint Thomas et en a fait le guide et le modèle des études théologiques. Ce à quoi on attachait de l'importance n'était pas de prendre position sur des questions proprement philosophiques, ni d'imposer l'adhésion à des thèses particulières. L'intention du Magistère était, et est encore, de montrer que saint Thomas est un authentique modèle pour ceux qui recherchent la vérité. En effet, l'exigence de la raison et la force de la foi ont trouvé la synthèse la plus haute que la pensée ait jamais réalisée, dans la réflexion de saint Thomas, par le fait qu'il a su défendre la radicale nouveauté apportée par la Révélation sans jamais rabaisser la voie propre à la raison. »

Achevons cette prédication en demandant à notre saint Patron:

- des grâces de pureté:

- des grâces pour une plus grande obéissance

- un plus grand amour du sacrement de l’Eucharistie.

- la pénétration de l’intelligence, la faculté de se souvenir, la méthode et la facilité de l’étude, la profondeur dans l’interprétation,

- et pour la prédication ou l’enseignement: une grâce abondante d’expression.

Que notre bien cher saint Patron nous conduise tous dans les voies de la sainteté et vers la Patrie du ciel. Ainsi soit-il.

 

[1] In de Trinitate de Boèce : q.5, a.1

[2] In Prooemium De anima

[3] « La charge de bachelier en théologie, spécialement dans la première moitié du 13ème siècle, consistait à expliquer l’Ecriture Sainte ou les Historiae de Pierre le Mangeur, c’est-à-dire l’histoire biblique. Vers le milieu du même siècle, on ajouta à sa charge l’explication des Sentences de Pierre Lombard. » Angelus Walz, s. Thomas d’Aquin; Louvain, 1962, page 77

[4] in Initiation à Saint Thomas d’Aquin par Jean-Pierre Torrell o.p., éd.univers. de Fribourg/Cerf 1993-p.133

[5] in Initiation à Saint Thomas d’Aquin op.cit.  p133

[6] in Saint Thomas, sa sainteté, sa doctrine spirituelle. Edition de la vie spirituelle. Lavaud, page 18

[7] DS 246, capitula pseudo Caelestina seu « indiculus » (435-442): « Legem credendi lex statuat suppicandi »: « Que la règle de la prière fixe la règle de la croyance. »

Cette formule a été reprise par divers souverains pontifes, notamment Pie XI dans la Constitution Apostolique Divini cultus (20 déc. 1928) et par Pie XII, dans Mediator Dei (20 nov. 1947)

[8] in Saint Thomas, sa sainteté, sa doctrine spirituelle. Edition de la vie spirituelle. Lavaud, page 2

[9] Références prises dans « La sagesse de Thomas d’Aquin », André Clément, NEL, Paris 1983

[10] Encycl. ÆTERNI PATRIS (4 août 1879): ASS 11 (1878-1879), pp. 97-115

[11] « entre tous les docteurs scolastiques, brille, d'un éclat sans pareil leur prince et maître à tous, Thomas d'Aquin, lequel, ainsi que le remarque Cajetan, pour avoir profondément vénéré les Saints Docteurs qui l'ont précédé, a hérité en quelque sorte de l'intelligence de tous (In 2am 2ae q. 148, a, 4, in finem.). Thomas recueillit leurs doctrines, comme les membres dispersés d'un même corps ; il les réunit, les classa dans un ordre admirable, et les enrichit tellement, qu'on le considère lui-même, à juste titre, comme le défenseur spécial et l'honneur de l'Église. - D'un esprit ouvert et pénétrant, d'une mémoire facile et sûre, d'une intégrité parfaite de mœurs, n'ayant d'autre amour que celui de la vérité, très riche de science tant divine qu'humaine, justement comparé au soleil, il réchauffa la terre par le rayonnement de ses vertus, et la remplit de la splendeur de sa doctrine. Il n'est aucune partie de la philosophie qu'il n'ait traitée avec autant de pénétration que de solidité : les lois du raisonnement, Dieu et les substances incorporelles, l'homme et les autres créatures sensibles, les actes humains et leurs principes, font tour à tour l'objet des thèses qu'il soutient, dans lesquelles rien ne manque, ni l'abondante moisson des recherches, ni l'harmonieuse ordonnance des parties, ni une excellente manière de procéder, ni la solidité des principes ou la force des arguments, ni la clarté du style ou la propriété de l'expression, ni la profondeur et la souplesse avec lesquelles il résout les points les plus obscurs. »

 

[12] Motu proprio « Doctor angelici”, le 29 juin 1914 :

« afin que fleurisse dans les écoles la doc­trine authentique et intégrale de saint Thomas, ce que Nous avons extrêmement à cœur » ; afin que disparaisse dès lors « cette manière d'enseigner qui s'appuie sur l'autorité et les préférences de maîtres particuliers », et qui n'a, pour cette raison, « qu'un fondement changeant d'où proviennent des opinions diverses et contradictoires... non sans un grand dom­mage pour la science chrétienne (Léon XIII, Epist. Qui te, 19 juin 1886). », Nous voulons, ordonnons, commandons que tous ceux qui détiennent la charge d'enseigner la théologie sacrée dans les universités, les grandes écoles, les collèges, les séminaires, les instituts ayant, par indult apostolique, le pouvoir de conférer les grades acadé­miques et le doctorat, aient comme texte de leurs leçons la Somme théologique, et l'expliquent en langue latine; et que, de plus, ils mettent un soin empressé à ce que leurs auditeurs entrent à son égard dans les meilleures dispositions. »