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LES CARACTERES DE LA ROYAUTÉ DE JÉSUS-CHRIST
Mes bien chers frères,
Quand on a dit que Jésus-Christ est au sommet de la création, l’exemplaire et le type de tous les êtres, le premier dans les complaisances et dans les décrets divins ; quand on a dit avec saint Paul qu’ « il récapitule en lui toute l’humanité »[1], on n’a pas épuisé la liste de tous les titres qui lui conviennent. Par rapport à nous, il n’a pas qu’une priorité de préexistence et de mérites, il a un domaine total, dans la pleine acception de ce grand mot : il est Roi.
De ses droits à la royauté, je ne dirai rien : ils nous sont assez connus. Ce sont les caractères de cette royauté que nous allons considérer.
1. La royauté de Jésus est indiscutable.
On voit contester la légitimité de certains pouvoirs humains, soit parce que l’origine en est suspecte, soit parce qu’ils ont été illégalement usurpés, soit parce que l’on s’en est emparé par ruse on par crime. Mais comment mettre en question la légitimité de l’autorité du Christ, quand sa divinité, de laquelle elle découle, est absolument démontrée ? C’est bien pour échapper à sa domination que l’on s’attaque avec tant de fureur et d’acharnement à son origine divine. N’est-ce pas David Strauss, le théologien protestant allemand, qui proclamait qu’on rendrait le plus grand service à l’humanité, si l’on prouvait que Jésus-Christ n’est pas Dieu ? La négation de la divinité de Jésus n’est pas nouvelle. Les modernistes n’ont rien inventé ! Le Christ est vraiment Dieu, est vraiment homme et pour cette raison la royauté du Christ Jésus dans le ciel et sur la terre est indiscutable.
2. La royauté de Jésus-Christ est infaillible.
Des pouvoirs humains, on peut toujours craindre des déficiences, des perversités ou des abus. Il est si facile ou de fuir la responsabilité, ou de verser dans la tyrannie ! Nous n’avons pas à redouter que Jésus-Christ fasse mauvais usage de son autorité. Il ne veut ni ne peut la faire servir qu’au bien des hommes ses frères. « Je ne suis pas venu pour me faire servir, a-t-Il dit, mais pour servir moi-même »[2]. Loin d’être une puissance despotique, son autorité est pour nous une sauvegarde sur laquelle nous devons nous reposer en toute confiance. Il ne l’exerce qu’en notre faveur.
3. La royauté du Christ est souveraine.
Sous ce rapport, nulle autre sur la terre ne saurait lui être comparée. Au-dessus de cette souveraineté, il n’en existe point. Toutes les autorités qui nous demandent ici-bas un degré, une forme quelconque d’obéissance, de quelque nom qu’elles s’appellent, à quelque ordre, familial, ou social ou spirituel qu’elles appartiennent, ne sont que des émanations de celle-là. Les plus grands potentats de la terre sont devant lui des vassaux, car tous relèvent de lui et lui doivent l’hommage, le tribut de leur soumission : « Ipse est Deus deorum et Dominus dominantium ; Il est le Dieu des dieux et le Seigneur des seigneurs »[3].
4. La royauté du Christ est absolue.
Dans son étendue, dans son exercice, dans sa durée, elle n’est tributaire de qui que ce soit. Il ne la tient et elle ne dépend d’aucune consultation populaire, d’aucun pacte, d’aucun mandat. Elle nous atteint, même avant et sans notre consentement : et son action est affranchie de tout contrôle, n’est soumise à aucune condition. Issue de Dieu, elle est indépendante comme lui.
5. La royauté du Christ est perpétuelle.
Les représentants du pouvoir ici-bas commencent et finissent, passent et disparaissent. Il en est dont le gouvernement n’est que temporaire. Et parmi ceux qui, de par une constitution, sont à vie, il en est qui abdiquent spontanément, d’autres qui sont renversés par une révolution triomphante ou victimes d’un attentat.
Mais Lui, notre Christ, ni Il abdique, ni Il ne peut être détrôné ou banni ; Lui, suivant le mot célèbre de Garcia Moreno, Lui « ne meurt pas. » Sa royauté ne peut finir. Elle nous atteignait hier, elle nous atteindra demain, elle atteindra après nous toutes les générations futures. C’était la joie de sainte Thérèse d’Avila de se répéter l’assurance donnée par l’ange à Marie : « Son règne n’aura pas de fin. » Ce doit être aussi notre joie de chanter chaque dimanche avec l’Église dans notre Credo : « Cujus regni non erit finis. » Non, pas de fin ; car cette souveraineté est immortelle, elle défie toutes les attaques, toutes les perturbations. Voilà vingt siècles qu’on la bat en brèche, que l’on croit en avoir raison et la détruire, qu’on dirige contre elle la presse, l’instruction, le théâtre, la littérature, la critique, les passions ; mais elle survit à toutes les conjurations. Jésus n’avait-il pas dit à sa servante de Paray-le-Monial : « Je règnerai malgré mes ennemis » ?
6. La royauté du Christ est universelle, elle s’étend à tout dans l’humanité.
Dans l’homme, elle atteint notre intelligence, dont elle exige l’adhésion à la vérité qu’elle enseigne ; elle atteint notre coeur, dont elle exige l’amour, un amour supérieur à tous les autres, en retour de celui qu’elle donne : elle atteint la volonté, dont elle attend l’obéissance à tous ses préceptes ; elle atteint les sens, qui sont les organes du service qu’on lui doit.
Elle atteint tout dans la famille : le père, la mère et les enfants. C’est elle qui consacre l’autorité des parents, laquelle est une parcelle de la sienne ; c’est elle qui sanctionne la dépendance des enfants vis-à-vis d’eux.
Elle atteint la société, qui, elle aussi est son œuvre. Non pas que Jésus-Christ tienne visiblement en main le gouvernail des peuples ; mais les chefs eux-mêmes relèvent de lui : per me reges regnant; leurs lois, leur gouvernement doivent s’inspirer de ses volontés : « et legum conditores justa decernunt »[4]. Le règne social du Christ est le droit radical, inséparable, inéluctable de sa divine suprématie. Rien n’est plus essentiellement opposé à ce droit que la prétention révolutionnaire et satanique d’éliminer le Christ du domaine social, d’effacer son nom de la législation, de le proscrire de tout ce qui touche au gouvernement des nations, de professer que l’État ne reconnaît aucun culte, c’est-à-dire ne reconnaît pas Dieu.
7. La royauté du Christ, enfin, est décisive.
Décisive pour les individus, parce que notre destinée dépend de l’attitude que nous avons prise vis-à-vis d’elle. Là est pour chacun de nous la vie ou la mort, le salut ou la damnation : ou nous y serons soumis volontairement, et Dieu nous en récompensera ; ou nous serons l’objet de ses châtiments, si la mort nous trouve en état de révolte.
Décisive aussi pour les sociétés. Puisqu’elles sont sous sa domination et que d’autre part leur destinée ne dépasse pas les limites de la vie présente, c’est leur prospérité ou leur malheur qui est ici en cause. Dieu bénit les peuples qui observent sa loi et se soumettent à son autorité : « Beatus populus cujus Dominus Deus ejus »[5] : il laisse au contraire les nations rebelles en proie à tous les ferments de discorde, de désordre et de ruine qu’engendre leur révolte. La loi est portée aussi bien contre elles que contre les individus : « Ceux qui s’éloignent de vous, Seigneur, périront. »[6]. C’est le triste spectacle que donne la société actuelle, apostate, rebelle, folle et décadente.
En ce jour, mes bien chers frères, où, par une solennité nouvelle et toute spéciale, l’Église honore Notre-Seigneur Jésus-Christ en tant que Roi, aimons à lui redire cette acclamation que l’apôtre saint Jean met sur les lèvres des vingt-quatre vieillards qu’il vit prosternés devant le trône de l’Agneau : « Vous êtes digne, Seigneur notre Dieu, de recevoir gloire, honneur et puissance. »[7]. « Il est digne, l’Agneau qui a été immolé, de recevoir la puissance et la dignité, et la sagesse, et la force, et l’honneur et la gloire, et la bénédiction. »[8]. Prions pour que individus et peuples se rangent sous son empire, et saluons dès maintenant le jour où il nous sera donné de mêler nos voix à celles des élus et de répondre par un amen éternel[9] au cantique ininterrompu qui retentit dans le ciel à la louange du Roi des rois.
Que la Reine du ciel et de la terre, la Vierge sainte et immaculée, nous bénisse et protège toujours.
Ainsi soit-il.