Le Saint du Jour
10 mars
Les Quarante Martyrs de Sébaste († 320)
L’empereur Licinius ayant ordonné que toute son armée
sacrifiât aux dieux, quarante soldats de la Légion fulminante, alors
campée à Sébaste, en Arménie, refusèrent de trahir la foi de leur
baptême et n’eurent tous qu’une réponse aussi simple que sublime: "Nous
sommes chrétiens !" Ni la douceur, ni les menaces ne peuvent les gagner,
et, après quelques jours de prison, ils sont conduits au supplice.
On était en plein hiver. Il y avait près de la ville un étang couvert de
glace; le gouverneur donna l’ordre d’y exposer les quarante soldats
pendant toute une nuit. Les saints martyrs, joyeux de souffrir pour
Jésus-Christ, disaient: "Il est bien difficile, sans doute, de supporter
un froid si aigu; mais ce sera une chose douce d’aller en Paradis par ce
chemin; le tourment est peu de temps, et la gloire sera éternelle; cette
nuit cruelle nous vaudra une éternité de délices. Seigneur, nous entrons
quarante au combat, faites que nous soyons quarante à recevoir la
couronne."
Qui pourrait imaginer les tortures endurées par ces hommes héroïques sur
leur lit de glace ? La seule pensée en fait frémir. Au milieu de la
nuit, un des combattants se laissa vaincre par l’intensité du froid, il
abandonna le poste d’honneur et vint se jeter dans le bassin d’eau tiède
préparé à dessein ; mais la brusque transition de température le
suffoqua ; il expira aussitôt, perdant à la fois la vie de la terre et
la vie du Ciel : fin doublement misérable, qui ne servit qu’à fortifier
tous les autres martyrs dans leur inébranlable résolution de souffrir
jusqu’à la mort.
En ce moment une brillante lumière inonda la surface glacée ; l’un des
gardiens, ébloui par cette céleste clarté, leva les yeux et vit des
anges descendre du Ciel, tenant à la main des couronnes suspendues
au-dessus de la tête des généreux martyrs ; mais la quarantième couronne
était sans destination : "Elle sera pour moi," se dit-il, et quittant
ses vêtements, il alla remplacer sur la glace le malheureux apostat, en
s’écriant : "Je suis chrétien !"
Le lendemain matin, les martyrs respiraient encore ; le gouverneur leur
fit briser les jambes et ordonna de les jeter dans un bûcher ardent. Le
plus jeune d’entre eux, Méliton, était encore plein de vie ; mais, aidé
des exhortations de son héroïque mère, il résista à toutes les
sollicitations des bourreaux, et consomma dans le feu son sacrifice avec
ses glorieux compagnons.
Leurs corps furent brûlés, et leurs ossements jetés dans une rivière ;
mais ils flottèrent sur l’eau et furent recueillis par les fidèles. Les
soldats chrétiens des premiers siècles ont souvent illustré leur foi et
leur courage dans les supplices, au milieu des persécutions.
(Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l’année,
Tours, Mame, 1950.)
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