Conférence de M. le Doyen André Clément à Gricigliano le 1er mai 2004

 

L’ASSOMPTION DE LA T.S. VIERGE   ŒUVRE DE LA PIÉTÉ DU FILS

PLAN 

Introduction

La Problématique                                      

L’autorité du Souverain Pontife

I - La substance du nom de la personne (suppo sitio))

II - La Sainte Vierge est-elle morte ?
III - La Piété du Fils

                         Solution.

 Notre dévotion d’hyperdulie.

Quelques lieux :

            Saint Thomas : Ia q.29, q. 45, q. 75...

                                   q.101, a.1 ; q.106, a.1 (Passim)

                                    IIIa q.50 et suivantes

                                   De anima II  lec.1

                                   IIIa q.27 et suivantes (à l’article 5 saint Thomas dit que Marie fut « liberata a culpa originali » !)  Commentaire de la salutation angélique, Nouvelles Éditions Latines

 

            Pie IX              - Constitution Apostolique « Ineffabilis Deus », 8 décembre 1854

            Pie XII             - Munificentissimus Deus, 1er novembre 1950

                                      Vulgens corona

            Mgr DIONNE - La grâce de Marie est d’ordre hypostatique (Laval Théol. et Phil.

                                               1954, vol. X  n°2)

            Charles DE  KONINCK  - La Piété du Fils  - PUL

                                                Le scandale de la médiation.  NEL

            St GRIGNION de MONTFORT  - Traité de la Vraie Dévotion

                                                         - Le Secret de Marie

                                                         - « L’amour de la Sagesse éternelle », Seuil  opera omnia

            CATÉCHISME DE L’ÉGLISE CATHOLIQUE, 1ère édition, Mame

            La Foi catholique

            B. de Margerie, s.j. « Récapitulation sur l’évolution historique de la doctrine de la

            Corédemption. » Revue Kephas, octobre-Novembre 2002

            CATÉCHÈSE MARIALE de s. s. Jean Paul II (1995-1997)

            Les Épîtres de saint Paul, en particulier I Tim. II, 5-6

            La Vierge Marie dans l’enseignement des Papes, Moines de Solesmes, 1981

            Saint François de Sales, opera omnia

            Quelques définitions – Texte remis en cours.

 

L’ASSOMPTION DE LA SAINTE VIERGE

ŒUVRE DE LA PIÉTÉ DU FILS

INTRODUCTION

I – Problématique

       Comme pour toute synthèse ou dissertation bien ordonnée, il faut tout d’abord poser les problèmes que soulève le sujet traité.

Le 1er problème est celui de l’autorité du Pape.

En effet, dans une définition dogmatique, expressément énoncée, l’assistance du St-Esprit assure le Saint Père du privilège de l’infaillibilité (C.A. « Pastor Aeternus » 18 juillet 70.

Toutefois, les attendus historiques, théologiques et philosophiques, eux, de quelle autorité sont-ils revêtus ?

La philosophie a-t-elle un rôle dans une telle constitution apostolique ? Si oui lequel ? et quelle est l’autorité qui y est attachée, son mode de certitude semblant différent même de celui de la science sacrée ?

X

Le 2ème problème concernant l’Assomption, des questions se posent encore.

1ère question :  lorsque l’on parle de Marie : de qui parle-t-on ? D’où la

                        question : La Sainte Vierge est-elle morte ?                

  Mais alors, si la mort est la conséquence du péché,

  comment cela pourrait-il être ?

2ème question : Le Verbe, étant une personne de la T.S. Trinité, n’a pas revêtu de ‘personne humaine’ dans son incarnation. Au plus s’est-il adjoint une nature humaine.

                        De ce fait, la Ste-Vierge avait-elle une vraie maternité qui justifiait que son Fils, par sa piété, lui épargnât la déchéance du tombeau ?

3ème question : A trop vouloir lier le sort de Marie à celui de Jésus, ne risque-t-on pas de fournir inutilement arguments aux protestants qui nous accusent quasiment de « déifier » la Sainte Vierge. De plus, une telle définition semble éloigner l’Eglise de Rome d’un œcuménisme par ailleurs souhaité. D’autant qu’un autre dogme semble en préparation !

4ème question : En conclusion, quelles conséquences pouvons-nous tirer des réponses aux questions qui précèdent, quant à notre dévotion d’hyperdulie, la vraie dévotion envers Marie ? Notre but, à travers l’effort que je vous demande ce soir, est de rentrer un peu plus avant dans le secret de Marie qui consiste à nous introduire chaque minute davantage au cœur de la T.S. Trinité jusqu’au jour où notre âme, pleinement épanouie aux illuminations de l’union divine, verra toutes choses dans l’Eternel Amour et dans l’unité.

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        J’ai emprunté l’essentiel des matériaux de notre entretien à Pie IX, pour l’Immaculée Conception, à Pie XII pour l’Assomption ([1]), à ses deux philosophes préférés : Thomas d’Aquin et Charles de Koninck et à divers théologiens et auteurs spirituels, qui honorent Marie et l’Eglise – ce qui est tout UN – au premier rang desquels St François de Sales ce qui ne vous étonnera pas. Je ne suis que leur haut-parleur. Pour ce qui est de moi, je me soumets sans restriction à l’autorité de l’Eglise.

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       Dans l’ordre spéculatif comme dans l’ordre pratique, une vérité doctrinale – a fortiori dogmatique – ne peut pas être séparée de l’ensemble théologique ou philosophique auquel elle appartient. Saint Thomas montre de la même manière que les vertus, par exemple morales, ne peuvent pas exister en perfection chez quelqu’un, si une seule fait défaut. Un ivrogne ne peut être prudent, fort ou sage !

       Le dogme divinement révélé et selon lequel l’Immaculée Mère de Dieu, Marie toujours Vierge, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, a été élevée en corps et en âme à la gloire céleste, a été défini par le St-Père Pie XII le 1er novembre 1950 ([2]) et n’échappe pas à cette affirmation.

        Ce dogme de l’Assomption souscrit à la même exigence, impliquant des notions théologiques et philosophiques étroitement unies pour la gloire du Dieu Tout-Puissant, qui a répandu sur la Vierge Marie, les largesses d’une bienveillance toute particulière et prédestinée, pour l’honneur de son Fils, vainqueur du péché et de la mort, dont la glorieuse résurrection fut le dernier trophée de la victoire, et pour que l’Eglise sache avec une absolue certitude que le combat livré par la Vierge Marie, unie à son Fils, se terminât par la glorification de son corps virginal. Toutes ces notions, qui impliquent les gloires de Marie voulues par la Trinité, ont un centre que Pie XII et mon doyen Charles De Koninck ont expressément désigné : la piété filiale de Jésus envers sa mère.

       C’est parce que cette vertu me paraît, comme elle a paru au Seigneur, une des plus importantes, que j’ai accepté, à la demande de M. le Supérieur et de l’abbé Lefèvre, d’en solliciter la grâce pour vous en parler ce soir.

II – L’autorité du Souverain Pontife

           Notre Seigneur a établi parmi nous un magistère vivant, principe de la communion, père et docteur de tous les chrétiens, doté, directement et immédiatement, du pouvoir plénier et souverain, rejoignant pasteurs et fidèles de tout rang et de tout rite, dans un devoir de subordination hiérarchique et de vraie obéissance, non seulement dans les questions qui concernent la foi et les mœurs, mais aussi dans celles qui  touchent  à la discipline et au gouvernement de l’Eglise.

           Quel est le fondement d’une aussi incroyable autorité ?

  En raison de notre nature, et par une pédagogie qui est celle même de l’Incarnation (et des dogmes consécutifs de l’Immaculée Conception – ineffabilis Deus – et de l’Assomption – munifiscentissimus Deus), il nous est naturel de n’avoir l’intelligence des principes les plus certains, que sous la dépendance des sens externes. C’est pour cette raison que le Christ, Verbe de Dieu après s’être incarné, s’être rendu sensible, visible par nous, nous a laissé comme règle prochaine de la foi, un homme comme nous, une personne visible, chef visible de l’Eglise.

           Saint Paul définit la foi (Hebr. IX-1) « la substance des choses qu’on espère, une conviction de celles qu’on ne voit pas ».

           Cette conviction de la vérité divine, dont l’évidence nous est actuellement cachée, doit nous parvenir d’une manière adaptée à notre condition ; mais adaptée ne veut pas dire abaissée ! Car cette vérité est la Personne même du Verbe de vie dont St Jean dira qu’elle est « ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé, et ce que nos mains ont touché » (1ère ép. I – 1) (Le toucher est le sens de la certitude, souvenez-vous de l’apôtre Thomas après la Résurrection !)

C’est donc par la bouche de l’homme qui est en Sa Personne l’Image du Père, que nous avons été instruits.

« Nul n’a jamais vu Dieu : le Fils unique, qui est dans le sein du Père, l’a fait connaître Lui-même ». (Jean I – 18)

Comme dit le Dr Angélique :

           « Cette condition de l’homme demandait que Dieu se fit connaître  lui-même comme homme d’ une manière sensible ». (C.G. III   C.54 – 55)

C’est donc grâce à son vicaire, norme visible de la foi, établie par le Christ, dont le fondement scripturaire est cité en plusieurs lieux des Évangiles par ex. en St Luc (XX – 32) :

           « J’ai prié pour toi, Pierre, afin que ta foi ne défaille point ; et toi, une fois revenu, affermis tes frères ».

C’est ainsi, dis-je, que la règle prochaine de la foi n’a cessé d’être une norme sensible, vivante et par suite conforme à notre condition. Qu’en leur personne privée, tous les papes n’aient pas été d’une humanité attachante autant que d’une impeccable sainteté, des exemples historiques le suggèrent. Dieu a voulu que la soumission à la règle visible de la foi ne dépende en aucune façon de l’affection toute humaine dont la personne privée du Vicaire peut être ou n’être pas l’objet. Ce serait même compromettre la foi que de la faire dépendre de la vertu personnelle – fut-elle exemplaire – de celui qui a été choisi pour exercer parmi nous l’autorité du Fils. D’ailleurs il n’y a eu que le Verbe fait chair et la Vierge dont Il est né, qui aient été en tout et sans l’ombre d’une faute, des modèles sublimes que la suprême hiérarchie des anges n’a jamais pu, ne pourra jamais qu’en deviner l’étendue et la mesure. St Thomas insiste (C.G. IV – 54) sur cette demonstratio ad sensum, qui fait dire au Seigneur lui-même (Jn. XIII – 15) :

           « Je vous ai donné l’exemple afin que vous agissiez comme j’ai agi à votre égard ».

           C’est le mystère de la pédagogie divine qui n’a pas choisi le savant, érudit et véridique Nathanaël loué par Jésus Lui-même, mais Pierre, l’obscur manœuvre parfois si hésitant, le pécheur et renégat, c’est celui-ci que le Christ a établi

            « seule règle visible et prochaine de notre connaissanc de Dieu dans la Sagesse de Dieu » (I Cor. I – 21)

            Lui, à qui Jésus dit un jour

            « passe derrière moi satan, tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais des hommes » (Mt XVI–23, Mc VIII-33)

         Et pourtant, sans lui, nous en serions réduits à choisir comme règle ultime de notre foi, la liberté de rester dans le doute et de verser dans la contradiction.

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En conclusion de ce premier point, lorsque le Pape ne définit pas ex cathedra au titre et privilège de son infaillibilité, les autres parties – en partie philosophiques – des constitutions apostoliques, les encycliques et texte du magistère ordinaire n’ont-elles que valeur d’opinion, respectable et honorable, certes, mais discutable ?

Pie XII répond  dans Humani Generis :

« Il ne faut pas estimer non plus que ce qui est proposé dans les encycliques ne demande pas de soi l’assentiment puisque les  pape s n’y  exercent   pas  l  e pouvoir  suprême  de leur magistère. A ce qui est enseigné par le magistère ordinaire s’applique aussi la parole : « Qui vous écoute, m’écoute » (Lc.X – 16), et la plupart du temps, ce qui est exposé dans les encycliques appartient déjà d’autre part à la doctrine catholique. Si les papes portent expressément dans leurs actes un  jugement sur  une  matière   qui était jusque-là controversée, tout le monde comprend que cette matière, dans la pensée  et  la  volonté  des   Souverains Pontifes, n ‘est plus désormais à considérer comme question libre entre les théologiens. »

Telle est la cas de notions théologiques, philosophiques et historiques contenues dans les constitutions apostoliques et en particulier  celle qui nous intéresse : la bulle dogmatique Munifiscentissimus Deus sur les notions pré requises ou concomitantes à la définition du dogme de l’Assomption de la T .S. Vierge Marie, Mère de Dieu.

    X

PREMIÈRE PARTIE

            La substance d’un nom de la personne (la suppositio)

        Le Christ est-Il réellement fils de la Vierge ?

 

       Pour apercevoir l’importance de la définition dogmatique et de l’application à Marie de la piété filiale de Jésus, il convient d’évoquer une notion un peu difficile en philosophie – et d’ailleurs utilisée dans plusieurs traités de théologie – celle de la personne – en grec hypostase.

       Dans un traité de logique (Periherm.) Aristote note que de la proposition :

      Homère est poète

On ne peut passer à l’affirmation :

       Homère existe

Le « EST » dans Homère est poète n’est pas affirmé d’Homère par soi, mais seulement par accident. Il n’existe donc pas, au sens absolu.

      Homère n’existe pas.

Il a existé.

Cependant pour que la proposition  « Homère est poète » soit vraie, il faut que le nom d’Homère tienne lieu d’un sujet dont on peut vérifier l’acception de ce nom – il faut une ‘suppositio’ ! (terme familier à ceux qui ont étudié le traité de la Trinité).

     « Anima Petri non est Petrus »

     «  Marie est la Mère de Dieu »

     «  St Pierre est un apôtre du Christ ».

L’Homère qui a existé, mais n’existe plus, ne peut pas être le même que celui de l’énonciation « Homère est poète », car il ne correspond pas au temps de la copule : « EST ».

Quelle est la substance du nom d’Homère dans la proposition « Homère est poète » ?

Lorsque nous disons : « Marie est Mère de Dieu », à qui ce nom de Marie est-il imposé ? Est-ce semblable à notre « Homère » ?

       Revenons à Homère et je vous fais grâce de quelques moyens termes.

La substance du nom est ce à quoi est imposé le nom  (id cui imponitur).

               Quel est donc celui auquel nous imposons le nom d’Homère dans la proposition « Homère est poète ».

Dans cette expression, l’être auquel nous imposons le nom d’Homère n’a qu’une existence intentionnelle, c’est-à-dire que mon intelligence se rend présent d’une manière intentionnelle (c’est-à-dire dans l’ordre de la connaissance) un sujet qui n’a qu’une existence d’objet.

 

       Entitativement, Homère n’existe pas car sa personne n’existe plus. Le fondement dans la réalité appartient au passé.

Ainsi, il est vrai, sous cette réserve, de dire « Homère est poète » puisque Homère a existé et qu’il était poète.

 

Une objection : il n’est pas tout à fait vrai de dire qu’ « Homère n’existe pas » puisque, sa partie principale, son âme immortelle qui subsiste par elle-même, existe.

       Cependant l’âme d’Homère n’est pas Homère. Homère est le nom de la personne, tandis que l’âme n’est pas la personne. Aucun attribut de la personne, qui est le tout complet, ne peut convenir à ce qui n’est qu’une partie ([3]) – même principale et subsistant par elle-même !

       Bien que l’âme soit immortelle,

       Il ne s’ensuit pas que l’homme soit immortel !

       Que l’âme   d’Homère existe, il ne s’ensuit pas que Homère existe !

Hugues de Saint-Victor et Pierre Lombard lui-même, enseignaient que l’homme c’est l’âme et que l’union de l’âme et du corps n’est pas l’essence de l’homme. D’ailleurs Descartes et sa postérité reprendront la même erreur. Certains scolastiques également.

Pour tous ces philosophes il suffit, pour être homme d’avoir une âme humaine et un corps – que ces deux substances soient, ou non, séparées ([4]).

       La personne se dit de la nature complète, le corps uni substantiellement à l’âme puisque, vous l’avez compris dans le cours du de Anima, le corps rentre dans la définition de l’âme qui, vous le savez, en est l’acte premier.

       Partie de la nature complète, l’âme rationnelle n’est pas « totus homo » et « anima mea non est ego ».

       Bien qu’elle puisse subsister par elle-même c’est seulement « secundum aliquid » qu’elle peut être dite « hoc aliquid ».

C’est la substance complète, le composé qui peut être dit « hoc aliquid », c’est-à-dire quelque chose qui est démontré être complet dans son existence et son espèce. ([5])

La personne, qui est la substance du nom, ne peut avoir qu’une existence INTENTIONNELLE, si nous parlons d’une personne dont l’âme seule existe.

L’âme de Pierre n’est point Pierre.

Pierre n’existe pas – ni au ciel, ni sur la terre – c’est l’âme de l’Apôtre qui prie pour nous. ([6])

Alors, ne faut-il  invoquer que l’âme de Pierre ?

Non… puisque l’Église fait le contraire et invoque la personne de Pierre et non pas son âme ! (in Exode : « Je suis le Dieu d’Abraham…repris par Jésus)

IIa IIae  q.83 a 11, ad 5um : « Les saints ont mérité de prier pour nous lorsqu’ils étaient sur la terre. Voilà pourquoi, lorsque nous réclamons leurs prières, nous leur donnons les noms qu’ils portaient ici-bas, sous lesquels nous les connaissons mieux. En les invoquant « tout entiers » comme ils étaient dans leur corps, nous affirmons notre foi en la résurrection future ».

X

Il n’en est pas de même dans la proposition :

« Marie est la Mère de Dieu »

car l’affirmation : « Marie existe » elle aussi est vraie. Car Marie existe dans le présent, selon sa substance complète. Cette vérité se distingue de la première proposition en ce qu’elle affirme

l’existence physique

actuelle, présente, de la personne comme personne.

Lorsque nous parlons de la T.S. Vierge, nous parlons d’une personne qui existe ; en invoquant la Mère du Christ, nous nous adressons à une personne qui EST actuellement, la génératrice de Dieu, et non pas seulement l’âme d’une personne qui était la Mère de Dieu.

          Si l’âme de la Sainte Vierge n’était pas actuellement unie à son corps, nous devrions, dans les propositions où le verbe « est » est affirmé par soi et non par accident, nous en tenir aux attributs de l’âme séparée ; nous ne pourrions lui attribuer aucun des prédicats de la personne. Si la personne n’était pas ressuscitée, il serait faux de dire que « La Mère de Dieu existe », « La Mère de Dieu existe au ciel », qu’ « elle » est avec le Christ, qu’ « elle » intercède pour nous.

          L’âme de Marie, s’adressant au Christ pour nous, ne pourrait pas l’appeler « Mon Fils ». Nous ne pourrions pas dire que notre Mère, Notre-Dame, notre Reine, existe au ciel. En priant : « Je vous salue, Marie », la substance de ce nom de « Marie » ne serait pas la personne elle-même de la Vierge. Alors que nous la supplions de prier pour nous à l’heure de notre mort, la mort n’aurait pas encore été vaincue en elle. Elle-même n’aurait pas en acte la perfection vers laquelle elle doit nous conduire. Son âme serait bienheureuse, mais la Vierge, la Mère de Dieu ne serait pas bienheureuse.

La piété du Fils de l’homme et le terme de la filiation

          Nous disions que si la Mère de Dieu n’existait pas dans le présent, s’il n’existait que son âme bienheureuse, elle ne pourrait pas appeler le Christ « Mon Fils ».

          En effet, la personne du Christ n’est Fils de Marie qu’en raison de sa filiation temporelle dont le terme n’est autre que la personne de la Mère ([7]).

          Dans la IIIa q. 35 a 2, saint Thomas pose la question de la naissance du Christ et de sa filiation. Vous avez vu avec Dom Chauveau le de Verbo Incarnato, donc je ne rappellerai que les conclusions afin de préciser les liens qui unissent Jésus à Marie : car c’est le fond et la lumière qui éclaire notre problème de ce soir.

 

          Dans une génération, le sujet désigne la personne ou l’hypostase de celui qui naît. En revanche, le terme d’une naissance est la nature (espèce) ou la forme qui donne le caractère de l’espèce.

          Bien-sûr, on ne peut pas dire absolument que la nature divine a été conçue, ou est née !

Dans le Christ il y a d’une certaine façon deux naissances :

-         l’une qui est engendrée éternellement et incorporellement de la substance du Père.

-         l’autre qui est engendrée selon la chair, temporellement, de la substance de Sa Mère, à raison de son humanité.

Marie est réellement Mère de Dieu selon la chair. Jésus, le Christ, est né de la femme, mais non pas selon sa divinité.

Mais Marie est , selon l’humanité, Mère de celui possède en même temps et l’humanité et la divinité ([8]).

           La filiation étant une propriété personnelle, appartient éminemment à la personne.

           Or, la personne de Jésus (suppositio – hypostase) n’a qu’une filiation éternelle.

Toutefois, Marie étant réellement Sa Mère, le Christ peut être appelé dans un sens bien réel Fils de la Vierge.

           Précisons que si le rapport temporel du Christ avec Sa Mère

-         est une entité réelle pour Marie

-         elle est une relation secundum rationem pour le Christ. (La relation réelle étant celle qui regarde Son Père Eternel.

          Ainsi, même si dans le Christ la relation de filiation temporelle n’est qu’une relation de raison, la vérité présente de cette relation n’en suppose pas moins l’existence actuelle de son terme et de relation réelle de maternité dans la personne de la Vierge.

           La personne divine, de par sa naissance réelle et de la nature réelle qu’elle a reçue de Sa Mère, est réellement Fils de la T.S. Vierge. Si Marie n’était pas glorifiée, cette personne divine ne serait pas telle dans le présent.

           Il serait faux de dire : « Le Fils de Marie existe » ou « Le Fils de l’homme existe ». Dans la mort de la Vierge, la filiation aurait été supprimée !

 

           Par conséquent, si la Mère de Dieu, terme de la relation de filiation, n’était pas ressuscitée, la filiation en raison de laquelle le Christ est appelé son  Fils, ne serait pas vraie dans le présent. La substance du nom dans la proposition

« Le Christ est le Fils de Marie »

ne pourrait pas être la personne elle-même du Christ.

De même, n’existerait pas la relation d’ « origination » du Christ à la Vierge Marie.

           On ne pourrait pas dire : « la relation de similitude du Christ à Sa Mère existe ». Comme l’exprime saint Thomas III a q.32 a 3 ad 1, c’est de la Vierge et d’elle seule que le Christ tient sa « similitudo speciei ».

Dès lors qu’il s’agit de relations réelles, il faudrait énoncer qu’actuellement, il y a de véritables privations dans le Christ, à l’endroit de Sa Mère, alors qu’Il est dans la gloire parfaite !

           Et surtout, la piété du Fils serait-elle maintenant parfaitement exercée à l’endroit de l’unique principe temporel de Son incarnation, si ce principe n’existait pas dans le présent selon son être même de Mère. Car la génération relève de la puissance végétative, inséparable de la corporéité.

           Il ne s’agit pas ici d’une subtilité de langage, ni d’une simple différence grammaticale des temps (passé, présent, futur).

           De même que la joie a éclaté après le Concile d’Ephèse qui a défini Marie comme theotokos, de même la piété des fidèles depuis des siècles n’a jamais douté qu’en disant

Mère de Dieu

Mère du Christ glorieux,

cette Mère ne soit une personne qui existe dans le présent.

           Pas plus que le Christ n’a attendu la fin du monde (futur à venir) pour ressusciter et fonder notre foi,

Il n’était pas imaginable – sauf aux hérétiques – que les temps touchant cette maternité divine fussent ou passés ou à venir.

La définition dogmatique nous donne une certitude que la pensée, l’intention et le culte des fidèles s’étend jusqu’à la vie présente de la Mère de Dieu comme personne.

Pie XII ne pouvait attendre davantage pour nous assurer que la Mère du Fils de Dieu existe.

 

 X

 

DEUXIÈME PARTIE

La Sainte Vierge est-elle morte ?

           Ce point a été, jusqu’à la proclamation de novembre 1950 par Pie XII, et même depuis, l’objet de vifs débats. Les tenants de l’immortalité énonçaient que la T.S.V. ne pouvait pas être passée par la mort et avançaient moult arguments d’excellente révérence à l’égard de la Mère de Jésus. Le Christ, Dieu Tout Puissant en Sa Personne divine, par piété pour Sa Mère ne pouvait pas ne pas avoir obtenu de Son Père qu’Il épargnât à Marie l’horreur de la mort et du tombeau. D’autres constatant que Marie, conçue sans péché et n’en ayant commis aucun, ne pouvait pas avoir été soumise à la loi commune des fils d’Adam pour qui la mort était la conséquence du péché : péché de nature et péché personnel, dont Marie était exempte. D’autres, par respect pour sa maternité divine, d’autres pour la part qui fut la sienne dans la Rédemption !…

D’autres encore lui attribuaient le privilège d’ADAM AVANT la chute ! etc.

           De fait si Marie est passée par l’état de mort, alors, pendant cet état, ce laps de temps, si court soit-il, et quel que soit le nom qu’on lui donne (dormition ou autre !) Marie a cessé d’être une personne.

Elle a cessé d’exister.

La Mère de Dieu aura cessé d’exister.

L’âme n’est pas la personne. Pie XII, après St Bonaventure et St Thomas, y insiste ([9]).

Ce n’est pas l’âme de Marie qui a donné naissance à Jésus. C’est la personne, unité substantielle du corps et de l’âme.

           En vertu de son Immaculée Conception et de la part qu’elle prit ensuite, par son libre consentement, à l’œuvre de la Rédemption, Marie fut également exemptée de la loi qui condamne tout homme à la mort.

D’après cette loi, dit Pie XII :

« Les corps même des justes sont dissous après la mort, et ne seront réunis, chacun à sa propre âme glorieuse qu’à la fin du monde.

Cependant, Dieu a voulu exempter de cette loi universelle la Bienheureuse Vierge Marie. Grâce à un privilège spécial, la Vierge Marie a vaincu le péché par son Immaculée Conception, et de ce fait, elle n’a pas été sujette à la loi de demeurer dans la corruption du tombeau, et elle ne dut pas, non plus, attendre jusqu’à la fin du monde la rédemption de son corps. » ([10])

 

La première partie de la Constitution Apostolique sur l’Assomption témoigne que, dans l’esprit des fidèles aussi bien qu’en réalité, « ces deux privilèges sont très étroitement liés – arctissime …inter se connectuntur (1). La raison de ce lien  très intime est quelque peu réduite par ceux qui voient dans l’Immaculée Conception un droit à l’immortalité, un droit tel que, au terme de sa vie terrestre, la Mère de Dieu entra dans la gloire céleste sans passer par la mort. Cependant nous sommes suffisamment en mesure d’affirmer que, au sentiment de l’Eglise, Marie est réellement morte. D’autre part, sa mort, nous n’en sommes pas moins certains, ne ressemble point à celle des autres hommes, soumis à la loi commune. C’est une vérité clairement établie dans la dite Constitution :

           « Sous la direction et la conduite de leurs pasteurs, les fidèles ont appris par la Sainte Ecriture que la Vierge Marie a mené, au cours de son pèlerinage ici-bas une vie de soucis, d’angoisses et de souffrances ; ils ont su, de plus, que s’est réalisée la prédiction du saint vieillard Syméon : qu’un glaive acéré lui transperça le cœur au pied de la croix       de son divin Fils, notre Rédempteur. Les fidèles ont également admis sans peine que l’admirable Mère de Dieu, tout comme son Fils unique avant elle, est décédée quemadmodum jam Unigenam suum, ex hac vita decessisse). Mais cela ne les a aucunement empêchés de croire et de professer ouvertement que son corps si saint ne fut jamais soumis à la corruption du tombeau et que cet auguste tabernacle du Verbe divin ne fut pas réduit en pourriture et en poussière. » ([11])

L’enseignement de ce document solennel est tellement net que nous ne pouvons suivre ceux qui, maintenant, se demandent encore si Marie est passée ou non par la mort. Qu’elle soit passée par la mort, quemadmodum jam Unigenam suum, c’est là désormais une vérité acquise, hors de doute, que nous en comprenions ou non le pourquoi et le comment. Il importe que chacun connaisse les raisons qui ont porté Pie XII et Charles De Koninck à affirmer que la réalité de sa mort se concilie avec le privilège de son Immaculée Conception : comment au terme même de sa vie terrestre, et en vertu de ce privilège, elle fut pleinement glorifiée, tout en accordant la réalité de sa mort.

De quelques distinctions à retenir en étudiant la nature de l’Assomption de Marie.

       Le mot « mort » passe communément pour un terme univoque embrassant, comme un tout essentiel des réalités aussi différentes que le processus de la mort, l’actuelle destruction même de la vie, et l’état de mort qui suit. En réalité ce n’est qu’à cause de son aboutissement, savoir de l’actuelle destruction de la vie, que le processus, c’est-à-dire l’altération corruptrice amenant cette destruction de l’être vivant, s’appelle mort.

 

La mort peut s’entendre de deux façons :

1-     ou bien de la privation même de la vie,

2-     ou bien de la corruption qui aboutit à cette privation. A son tour, la corruption, tout comme la génération, peut s’entendre de deux façons :

1-     d’abord du terme même de l’altération, et ainsi, à l’instant même où la vie cesse, la mort est venue…

2-     La corruption peut s’entendre aussi de tout le mouvement d’altération, dans le sens où l’on dit que quelqu’un meurt quand il va mourir (dum movetur in mortem) ; de même on dit qu’une chose est produite quand elle est en train d’être produite. ([12])

 

L’état de mort aussi est appelé « mort », en raison de l’actuelle perte de vie, qui est le commencement de cet état. Remarquons néanmoins qu’une personne n’est pas plus réellement morte durant le cours de cet état, qui est mesuré par le temps , qu’elle ne l’était dans l’indivisible du temps, c’est-à-dire au premier instant où elle fut privée de la vie. Cet état est, lui aussi, un autre sens de « mort ».

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Résumons donc.

Ce qui est exclu :

-         que l’âme de Marie ait été maintenue dans un état de séparation tel que pendant un temps, étant dans la mort, elle aurait cessé d’exister

- comme personne

- comme être humain

- comme Mère de Dieu

-         que durant ce temps, quelque court qu’il ait pu être, la grâce de la maternité divine – source de la grâce habituelle et de tous ses autres privilèges comme Mère de Dieu – aurait été retirée.

Adage en théologie : « ce qu’Il concède par grâce, Dieu ne le reprend jamais sans faute préalable » .

Conçue Immaculée et entièrement confirmée en grâce, Marie n’a jamais pu commettre la plus légère faute.

 

C’est pourquoi certains théologiens ont conclu que Marie ne mourut point ; que son Immaculée Conception impliquait le droit à l’immortalité. De fait, le texte de la définition ne comporte pas le mot « Mort ». Or Pie XII explique dans la Constitution que les fidèles ont admis sans peine et la mort de la T.S. Vierge et que son corps ne fut jamais soumis à la corruption. Le Saint Père emploie l’expression

« Ex hac vita decessisse »

ce qui, même en latin, ne peut signifier autre chose que le décès.

       L’apparente contradiction est levée par les sens, que nous avons relatée tout à l’heure, du mot « MORT ».

       La foi doit chercher l’intelligence.

 

Le Saint Père fait aussi appel à la liturgie à laquelle il attache une particulière autorité. Dans le Sacramentaire grégorien qu’Adrien 1er envoya à Charlemagne, on lit ceci :

       « La fête de ce jour en lequel la Sainte Mère de Dieu subit la mort temporelle mais cependant ne peut être humiliée par les liens de la mort, elle qui engendra de sa chair, son Fils, Notre Seigneur ».

Historien impartial, Pie XII cite dans le même sens saint Jean Damascène, saint Amédée, saint Antoine de Padoue et d’autres encore parmi  lesquels je ne résiste pas à privilégier celui qui est tant aimé de cette maison, saint François de Sales qui donne une synthèse parfaite en demandant :

       « Qui est l’enfant qui ne ressuscitast sa bonne mère s’il pouvait

       et ne la mist en paradis après qu’elle serait décédée ? »

De tous les auteurs cités par Pie XII dans la bulle, il n’y en a pas un seul qui n’ait enseigné la mort de la Vierge. St François de Sales a, pour sa part, fermement combattu l’opinion contraire dans un sermon pour la fête de l’Assomption, qu’il termine en exposant que

       « La vérité est qu’elle (Marie) est morte et trépassée aussi bien        que son Fils et sauveur… »

et dans un autre sermon il affirme que

       « ce n’eust point esté un advantage ni un privilège pour la Sainte

       Vierge de ne point mourir, ains elle avoit tousjours désiré la mort

       dès qu’elle la vit dans les bras et dans le cœur mesme de son très

       sacré Fils ».

Tout en étant confirmée dans le bien depuis sa conception, l’âme de Marie fut béatifiée, glorifiée dans l’instant même où s’achevait son pèlerinage ici bas.

 

       Et vous n’ignorez pas que l’instant est l’indivisible du temps (comme le point indivisible dans l’espace).

       Ainsi, à travers l’âme glorifiée de Marie, son corps virginal devient corps glorieux. La glorification du corps virginal présuppose – au moins d’une antériorité de nature, de cause formelle – la béatitude de l’âme. Car c’est par l’âme que le corps est glorifié.

 

       De plus, et Pie XII s’arrête à l’évocation de saint Jean Damascène : en Marie la mort est principe de vie  immuable, d’une vie incomparablement plus parfaite de sa personne.

De ce fait, la mort de Marie peut s’appeler la vie rénovée. La mort et la résurrection n’en sont pas moins distinctes, même s’ils vont ensemble avec l’Assomption.

Il faut noter que même là où Marie partage toujours le sort de son Fils, il demeure un rapport sous lequel ni la mort du Christ,  ni sa résurrection ne pourraient s’assimiler à celles de Marie.

1 – C’est en mourant sur la croix que le Christ a remporté sa victoire. (Centurion : « vraiment cet homme était le Fils de Dieu »)

2 – C’est QUO AD NOS

en demeurant dans le tombeau jusqu’au 3è jour que le Verbe Éternel a démontré ad sensum la vérité de sa nature humaine et de sa mort. De même qu’Il a manifesté sa victoire et sa puissance sur la mort en ressuscitant.

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N.B. : - la Personne du Christ est absolument immortelle.

- Sa mort, comme celle de tout autre homme consiste dans la     séparation de l’âme et du corps, mais dans le cas du Christ,

- l’âme d’une part

- le corps d’autre part,

même SEPARES, restent unis à la Personne divine. Là contre étant une créature, l’être de la PERSONNE de Marie dépend essentiellement de l’union de l’âme et du corps.

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       Tout le contexte de la Constitution Apostolique indique, sous l’autorité du Souverain Pontife que la mort de la T.S. Vierge est bien incluse dans la définition.

       Il faut donc tenter de savoir en quoi a consisté la mort de Marie.

Car, bien que l’unité de la Mère et de son fils soit très étroite, on ne peut assimiler le trépas de Marie

-         ni à celui de son Fils, personne divine immortelle

-         ni à celui des bienheureux qui attendent la Résurrection, c’est-à-dire la ré-unité de leur corps à leur âme, à la fin des temps

-         ni à la migration des fidèles qui seront trouvés vivants à la fin des temps (ils mourront probablement)

-         ni à la glorification d’Adam s’il n’y avait pas eu le péché originel (il ne serait pas mort)

Je ne reprendrai de ces divers cas que ce qui concerne la Mère de Dieu (je vous renvoie à saint Augustin, saint Albert et surtout à saint Thomas et la bulle de Pie XII pour comprendre un peu de ces mystères).

       Après avoir dit dans le cours du texte que « l’admirable  Mère de Dieu, à l’imitation de son Fils unique, (quemadmodum jam unigenam suum, ex hac vita decessisse) quitta cette vie ou déceda », la définition dogmatique (C.A. Munificentissimus Deus) exprime que Marie « à la fin du cours de sa vie terrestre

« expleto terrestris vitae cursu »

a été élevée en âme et en corps à la gloire céleste ».

La médiation co-rédemptrice inclut la mort de Marie par amour.

       Enfin en 1997 à l’occasion de sa catéchèse mariale, J.P.II n’hésite pas à souligner que, coopératrice de notre Rédemption, co-rédemptrice à toute l’œuvre du Christ et en particulier au pied  de la croix par le consentement de son amour, Marie a pu partager la souffrance et la mort en vue de la rédemption de l’humanité. St François de Sales au Livre VII du Traité de l’amour de Dieu (cap.13,14) estime que la mort de Marie a eu lieu à la suite d’un élan d’amour…Il affirme que la Mère de Dieu mourut d’amour pour son Fils Jésus. » (cité par J.P.II)

       Comment alors comprendre que la mort véritable et la Résurrection sans intervalle de temps n’impliquent, de soi, aucune contradiction ?

       Pour le faire comprendre, il faut vous remettre en mémoire un peu de philosophie de la nature.

                La mort, au sens propre et essentiel qui est un devenir substantiel par contradiction, ne peut se produire que dans l’instant – l’indivisible du temps. Puisqu’il ne peut y avoir d’avant dernier instant, mais seulement un dernier temps, le dernier instant de la vie de Socrate est le premier où il a déjà cessé d’exister. La mort, au sens le plus propre du mot ne peut se dire que de cet instant, jamais d’une durée du temps qui le précède ou le suive. C’est un cas de fieri et simul factum esse. La résurrection, elle aussi, s’opère en un instant. Le premier instant, ici, est celui où la personne est déjà ressuscitée ; c’est le seul auquel convienne la résurrection au sens essentiel du mot. Tout le monde est d’accord ici. Vient maintenant la question : la mort et la résurrection pour être réelles, doivent-elles être séparées par un intervalle de temps ? L’indivisibilité de l’instant ne peut pas relever d’une expérience sensible. Dans le cas du Christ, « afin de confirmer la foi en la réalité de son humanité et de sa mort, il était nécessaire qu’il y eut un intervalle de temps entre la mort et la résurrection ». (IIIa P. q.53 a.2 c.)

Est-il vraiment nécessaire que la résurrection vienne après la mort, en donnant cet après une valeur de temps ? Si oui, combien de temps après ? Au moins un instant, direz-vous ? Une telle réponse suppose la possibilité d’un instant qui suive immédiatement l’autre : elle implique donc contradiction puisque, pour qu’il y ait deux instants, il faut qu’ils soient séparés par un intervalle de temps.

       Tout ceci découle de la doctrine générale que développe Aristote dans sa Physique (L.VI et L.VIII, ch.8). Saint Thomas s’y tient fidèlement, comme seule solution possible, lorsqu’il étudie le caractère instantané de la génération et de la corruption, de la transsubstantiation et de la justification. Dans la justification, le dernier instant du péché est le premier où il n’y a plus de péché, et le premier où il y a déjà la grâce. Le dernier instant du pain est le premier où le pain n’est plus, et le premier où le corps du Christ est déjà présent. Le dernier instant de la vie de saint Pierre fut le premier où son âme était déjà séparée de son corps mortel (corpus animale). Le premier instant de sa vie future sera celui où son âme sera déjà réunie à son corps glorifié (corpus spirituale).([13])

       Le dernier instant de notre vie terrestre pourrait être, si nous sommes présents à la fin du monde, l’instant où l’âme glorifiée est déjà réunie au corps devenu immortel.

       Notre imagination nous rend difficile de comprendre qu’en ce cas

       - il y aurait eu un dernier instant de notre vie dans l’union d’une âme et d’un corps corruptible,

       - c’est-à-dire le premier instant du Primum non esse de notre vie terrestre : ce qui constitue proprement la mort

       - le même instant serait le premier instant où l’âme et le corps glorifiés se trouvent déjà réunis,

    ce qui est l’instant (le même) du primum esse de la vie glorieuse, ce qui constitue la résurrection.

Aide pédagogique : schéma

D    (ce qui est en question)

 

A              x                                    n-x                                 B

     antérieur           C                ultérieur

                                                                                                                                                                                D = la chose

L’instant C appartient à l’affection ultérieure B

 

C’est un seul et même instant qui est à la fois ultime et premier

                          D  est  x  pendant tout le temps A

                          et  non-x  pendant tout le temps B

                          or « C » est dans tous les deux

mais en  A  en tant que dernier instant      

et en  B  en tant que premier instant

C’est UN numériquement, mais pas en NOTION !

Quant à ce qui est en question, appelons-le « D » c’est toujours à l’affection ultérieure qu’appartient l’instant  C .

(1)             L’instant est donc commun au passé et à l’avenir.

Les applications en théologie sont importantes

-         pour la transsubstantiation

(1)                     -   pour la justification de l’impie

-   pour la gloire de Marie

 

(1)   Phys. VIII  lec.17 n.11

(2)   IV Sent. Dist. 11 q.1 a.3 qc. 2 ad.2

(3)             La transsubstantiation est le terme d’un certain mouvement : la prononciation des paroles. D’où l’ultime instant du temps qui mesure cette énonciation est l’instant même où, pour la première fois, le pain n’existe pas et où se trouve immédiatement le Corps du Christ.

 

(4)             «  Un temps donné a son terme marqué par un instant…Le dernier instant de ce temps, est le premier instant du temps suivant. Il y a un dernier temps (pas instant) qui touche à sa fin et l’instant, au terme, est le premier où l’âme possède la grâce, alors que dans tout le temps qui a précédé le péché était en elle. »

 

                        Ainsi Socrate n’a jamais connu d’instant vraiment ultime où il était encore vivant. Le dernier instant de sa vie est celui où l’âme est déjà séparée du corps.

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Pour la Sainte Vierge :

1-     elle n’a jamais connu la mort commune. Car, en ce cas, sa personne aurait cessé d’exister, ce qui est incompatible avec l’absence de toute faute en Marie et avec la relation à son Fils.

2-     Elle n’est jamais passée par l’état de mort, donc son corps n’a jamais été sujet à la dissolution.

Il n’y a jamais eu aucun temps où elle était morte.

 

(2)   Quodl. VII a 9 c

(3)   Ia IIae q.113 a 7 ad 5

 

1-    La Mère de Dieu n’a donc jamais été séparée de son Fils, car la mort ne s’est vérifiée que du Premier Instant même de sa vision dans le Verbe.

L’instant final de cette vie est celui-là même où vit, instantanément en corps et en âme, la même personne selon l’état de gloire.

           C’est ainsi que, par cette mort que saint Amédée qualifie de glorieuse, le Sauveur qui est la Résurrection  démontre que sa victoire sur la mort est complète.

St Thomas  (Exposit. super. Salutatione  Angelica  et IIIa q.27-34)

enseigne que

           « La grâce que reçut l’âme de la Vierge fut en telle                abondance qu’elle rejaillit jusque sur sa chair, afin                que, dans cette chair, Marie conçut le Fils de Dieu…            elle rejaillit de plus, (continue Thomas) sur l’humanité

           toute entière. »

De même qu’au premier instant de sa conception, elle fut déjà parfaitement préservée de la tâche originelle, de même le dernier instant de sa vie terrestre était identiquement le premier où elle fut déjà pleinement revêtue de la gloire méritée dans la victoire complète sur le péché et sur la mort. Cette gloire qu’elle revêt par et avec le Fils de l’homme qui la choisit pour Mère par un décret singulier de prédestination, exprime la gloire fulgurante de la T.S. Trinité.

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           Parce que, comme nous avons essayé de le montrer, la mort de Marie ne fut ni la mort commune ni celle d’aucun autre cas de nature humaine, le Pape Pie XII dans la définition incluse dans la Const. Apost. Mun. Deus, n’a pas employé le mot “MORT”. Citant Suarez, le Saint Père donne une règle de méthode en mariologie par laquelle nous conclurons cette deuxième partie :

  « Les mystères de grâce opérés par Dieu dans la Vierge         Marie ne doivent pas se mesurer aux règles ordinaires, mais à la toute puissance divine. »

 

X

 

TROISIÈME PARTIE

La Piété du Fils

« Il leur était soumis » (Lc 2, 51)

 

                Dans la bulle dogmatique, Pie XII cite plusieurs Pères et Théologiens dont saint François de Sales qui, après avoir soutenu qu’on ne peut mettre en doute que Jésus-Christ a accompli à la perfection le commandement divin qui prescrit aux fils d’honorer leurs parents, se pose la question :

       «  Qui est l’enfant qui ne ressuscitast sa bonne mère s’il pouvait

       et ne la mist en paradis après qu’elle serait décédée ».

 

Saint Alphonse écrit :

       « Jésus n’a pas voulu que le corps de Marie se corrompit après sa

       mort, car ç’eût été un objet de honte pour lui si sa chair virginale

       était tombée en pourriture, cette chair dont lui-même avait pris

       la sienne ».

 

et saint Jean Damascène explique qu’

       «  il fallait que celle qui avait conservé sans tâche sa virginité dans

       l’enfantement, conservât son corps sans corruption même après la

       mort… »

et un peu plus loin :

       «  il fallait que la Mère de Dieu possédât tout ce qui appartient à

       son Fils et qu’elle fut honorée par toute créature comme la Mère

       de Dieu et sa servante. »

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Le fondement de ce dogme est donc que les écritures et la tradition, les arguments des Pères, des Théologiens et des Papes proposent que

       « L’auguste Mère de Dieu dans l’union la plus étroite avec son

       Divin Fils partage toujours son sort ».

        « Le Christ Jésus, notre Rédempteur, est le Fils de Marie. Il ne pouvait certainement pas, Lui qui fut l’observateur de la loi divine, le plus parfait, ne pas honorer, avec son Père Éternel, sa Mère très aimée ».   (M.D. de Pie XII p.153)

« Or il pouvait la parer d’un si grand honneur qu’il la garderait exempte de la corruption du tombeau. Il faut donc croire que c’est ce qu’il a fait en réalité ».  (idem)

De plus, précisons que la Paternité Divine est la source de la maternité de Marie.

Par sa naissance temporelle, le Fils s’impose le devoir de piété

       Le Père éternel, première Personne de la très sainte Trinité, engendre son Image consubstantielle, le Verbe de Dieu, le Fils, la deuxième Personne de la Trinité. Et ce Fils provient, il naît éternellement du Père selon une procession purement intellectuelle, entièrement spirituelle. Et dans cette naissance du Fils en Dieu procède en même temps la représentation de tout ce que Dieu peut faire et de tout ce qu’Il fait. Or, parmi les choses dont le Verbe – sans lequel rien n’a été fait de ce qui a été fait – est la conception, il y a, premièrement le Fils lui-même, mais en tant qu’Incarné, le Sauveur, et sa Mère « unie de toute éternité à Jésus-Christ, d’une manière mystérieuse, par un même et unique décret de prédestination ».(Mun. Deus p. 768)

Sans la Mère, le Fils incarné n’aurait pas la nature de Fils selon son humanité dans son incarnation, mais uniquement selon sa naissance du Père éternel. En d’autres termes, Dieu a voulu que la venue du Fils parmi nous soit une procession par voie de naissance, qui imite la génération éternelle à ce point d’être, elle aussi, une génération au sens le plus propre du mot.

       L’incarnation par voie de naissance met en quelque sorte Dieu dans la dépendance d’une personne purement humaine d’une nature de chair qui l’engendre. Cette dépendance fonde sa piété filiale. Que l’on se souvienne du recouvrement au temple : « Il leur était soumis » (Lc.2-51)

(Ce qui est à distinguer de la génération spirituelle par laquelle le Fils de Dieu procède du Père sans l’imperfection d’une dépendance dans l’être).

Pour notre propos, relevons que

-         la plupart des saints auteurs notent que, comme son Fils, Marie est morte,

-         qu’il était impossible à la piété de Jésus pour sa Mère qu’elle connut, fut-ce dans le plus petit intervalle de temps, la corruption de son corps.

-         Bien que le sort de Marie fut lié à celui de son Fils, elle n’est toutefois qu’une personne humaine. Jésus, Personne divine, seconde de la T.S. Trinité, pouvait rester deux nuits et un jour dans le tombeau sans corruption de par la glorification et la vision liée à la Personne divine. C’est pourquoi – bien que l’Eglise ne se soit pas doctrinalement prononcée – les Papes, la plus part des Pères et des fils de saint Thomas ne retiennent pas la pieuse hypothèse de la dormition notifiée au début de l’ère chrétienne par la piété de certains fidèles. Les instruments philosophiques et théologiques faisant défaut, la difficulté d’une apparente contradiction était ainsi contournée. Puis saint Augustin, saint Albert, saint Thomas et leurs commentateurs ayant progressivement fourni les instruments intellectuels aptes à rendre compte de ce mystère, ajoutés à l’assistance du St-Esprit auprès des Souverains Pontifes ont permis d’aboutir à une formulation parfaite des deux privilèges de Marie :

-         chez Pie IX pour l’Immaculée Conception

-         chez Pie XII pour l’Assomption.

Ces deux dogmes confirmés par des signes maternels – qui eux n’engagent pas la foi – nous pouvons admirer dans tout leur éclat cette gloire de Marie que la piété du Fils a voulu aussi semblable que possible à la Sienne.

       Dans la C.A., Pie XII revient plusieurs fois sur la piété dans son rapport avec l’Assomption.

1 – La piété des fidèles qui les incite à supplier l’Eglise de mettre      en lumière la vérité de l’Assomption corporelle de la Mère de Dieu.

2 – L’Assomption est une œuvre de piété  du Fils

3 – Grâce à la définition solennelle de ce dogme, les fidèles sont portés à une piété  plus grande envers leur Mère du Ciel.

4 – (// avec 2) La piété du Fils est d’abord celle de tout fils envers sa mère.

       Le corps est essentiel à la maternité. Une mère n’est pas mère dans son âme seulement. La maternité est un attribut de la personne. Sans son corps, Marie ne serait pas mère – ni corporelle, ni spirituelle.

       C’est donc la personne de la mère, corps et âme, qui fait l’objet de la piété du Christ. C’est l’union de l’âme et du corps qui essentiellement forment le principe géniteur. C’est grâce à l’Assomption que cette Mère existe comme MERE et comme notre Mère.

       Grâce à l’Immaculée Conception, la Vierge Mère est d’autant plus digne de la piété de son Fils que la chair qu’elle lui a donnée était, de ce fait, plus parfaite, plus pure dans la totalité de son être.

       Et c’est pourquoi, Pie XII explique que « Jésus-Christ à cause de sa piété à l’égard de sa Mère, a voulu l’élever au ciel ». Et le Saint Père de souligner l’incomparable dignité de sa maternité divine et toutes les grâces qui en découlent, à savoir – sa sainteté insigne qui surpasse la sainteté de tous les hommes et des anges ; - l’intime union de la Mère avec son Fils et ce sentiment d’amour privilégié dont le Fils honorait sa très digne Mère.

       Marie, enfin, méritait la piété du Fils en tant qu’Il est Fils Rédempteur. Jésus, le nom du Christ, veut dire Sauveur – en tant que Rédempteur par Sa Passion et sa mort. Comme Mère, Marie n’éprouve pas seulement de la pitié lors de la passion et de la mort de son Fils, mais de la plus cruelle douleur. Son cœur maternel, par le consentement douloureux de son amour, participa si intimement à la passion que l’on parle justement de la compassion de Marie qui s’est vue attribuer le titre de co-rédemptrice. Le mal de la Passion, de la Victime née de sa chair et de la compassion de Marie sont le même mal et ils en souffrent per modum unius. (Film LA PASSION de Mel Gibson)

       Il convenait donc qu’à ce titre de co-rédemptrice qui fait d’elle, avec l’offrande sacerdotale du Sauveur, un tout premier principe de ce royaume dont l’ennemi est déjà vaincu, elle fut, avec son corps glorifié dans l’Assomption,  en personne, au ciel, comme mère du Rédempteur, et bien-entendu, en dépendance de Lui.

 

Pitié : tristesse pour la misère d’autrui

Douleur : tristesse causée par un mal infligé à nous-même

Corédemptrice : art. du Père de Margerie

Médiation corédemptrice.

 

CONCLUSION

La vraie dévotion à Marie

       Coopératrice privilégiée de notre salut, cause instrumentale de la Rédemption, la médiation corédemptrice de Marie évoquée à plusieurs reprises par J.P. II ([14]), est bien entendue subordonnée à  et en  dépendance de celle du Christ, unique Médiateur (saint Paul I – Tim II  5-6). Marie, nous dit le Catéchisme de l’Eglise Catholique ([15]) a prononcé son oui (de l’Annonciation à la Croix) au nom de toute la nature humaine.

       La maternité divine, ré-affirmée par Jésus du haut de la Croix, fonde et sa maternité sur nous et sa médiation corédemptrice, qui sera  - les fidèles l’espèrent – la prochaine définition dogmatique de l’Eglise.

       La dévotion, le culte d’hyperdulie consiste à reconnaître le maximum d’honneur que l’on doit à celle qui est la plus près de Dieu, qui a la plus grande intimité, affinité avec Dieu. Telle est la nature de notre dévotion envers la T.S.Vierge. Notre Saint-Père et Marthe R. ont privilégié le Secret de Marie de Grignion de M.. C’est pourquoi je terminerai par lui.

LE SECRET DE MARIE

       « C’est par la T.S.Vierge que Jésus-Christ est venu au monde,

       et c’est aussi par elle qu’Il doit régner dans le monde ».

Conformément à toute la Révélation chrétienne l’action du St Esprit est inséparable de celle de Marie.

Ce qui est donné à Marie, loin d’être ôté à Dieu comme la réforme le laisse entendre, honore Dieu plus noblement.

« Il n’y a point et il n’y aura jamais de créature où Dieu soit plus grand, hors de lui-même et en lui-même que dans la divine Marie »… »Marie est le paradis de Dieu ». St Augustin dit : « Forma Dei ».

       « Heureuse, mille fois heureuse est l’âme ici bas, à qui le St-Esprit

       révèle le secret de Marie ».

Ce secret pour Montfort, c’est Marie elle-même. Nous ne pouvons la connaître uniquement que si le St-Esprit nous la découvre !

En Marie «  cette âme ne trouvera que Dieu seul, sans créature, dans cette aimable créature ».

p.28  « Se donner à Jésus par les mains de Marie c’est imiter Dieu le Père qui ne nous a donné Son Fils que Par Marie et qui ne nous communique ses grâces que par Marie. C’est imiter Dieu le Fils qui n’est venu à nous que par Marie…c’est imiter le St-Esprit qui p.35 ne nous communique ses grâces et ses dons que par Marie ».  Secret de Marie  pp.16 à 20

La vraie dévotion à Marie c’est l’esclavage d’amour qui consiste à déposer dans son cœur maternel ce que nous sommes, ce que nous aimons, ce que nous désirons afin que ce soit elle qui présente à Dieu ses enfants très aimés sur « le plat d’or de sa charité ». Son Fils, unique médiateur auprès du Père, ne peut y résister. Je terminerai par l’acte de consécration si chère au Cœur de Marie, des Papes que j’ai connus, spécialement de Pie XII et de J.P. II, de Marthe dont je vous ai parlé et qui vivait – à l’image des Souverains Pontifes qu’elle a connus et en union intime avec eux – cette parfaite dévotion à Marie pour rejoindre la T.S. Trinité.

       « Moi, pécheur infidèle, je vous renouvelle et ratifie aujourd’hui entre vos mains les vœux de mon baptême : je renonce pour jamais à Satan, à ses pompes et à ses œuvres, et je me donne tout entier à Jésus-Christ, la Sagesse incarnée, pour porter ma croix à sa suite tous les jours de ma vie, et afin que je lui sois plus fidèle que j’ai été jusqu’ici.

 Je vous choisis aujourd’hui, ô Marie, pour ma Mère et Maîtresse. Je vous livre et consacre, en qualité d’esclave, mon corps et mon âme, mes biens intérieurs et extérieurs, la valeur même de mes bonnes actions passées, présentes et futures, vous laissant un entier et plein droit de disposer de moi et de tout ce qui m’appartient, sans exception, selon votre bon plaisir, à la plus grande gloire de Dieu dans le temps et l’éternité. 

Recevez, ô Vierge bénigne, cette petite offrande de mon esclavage, en l’honneur et union de la soumission que la Sagesse éternelle a bien voulu avoir de votre maternité ; en hommage de la puissance que vous avez tous deux sur ce petit vermisseau et ce misérable pécheur, et en action de grâce (des privilèges) dont la Sainte-Trinité vous a favorisée.

Je proteste que je veux désormais, comme votre véritable esclave, chercher votre honneur et vous obéir en toutes choses.

O Mère admirable ! présentez-moi à votre cher Fils en qualité d’esclave éternel, afin que, m’ayant racheté par vous, il me reçoive par vous. »

 

                                                                                                                                     André CLÉMENT

                                                                                                                                    Doyen Fondateur de la Faculté Libre de Philosophie Comparée (IPC)

 


[1] Const. Apost. « Munifiscentissimus Deus », 1er novembre 1950

[2] Const. Apost. « Munifiscentissimus Deus », 1er novembre 1950

[3] De Anima

[4] IIIa q.50 a 4 c.

[5] Hoc aliquid a deux sens :  1) quelque chose de subsistant : ainsi l’âme ou une partie importante du corps.  2) quelque chose de complet subsistant dans la nature de quelque espèce. Exclut l’imperfection de la partie. Ainsi c’est l’âme et le corps qui composent le hoc aliquid.

[6] IIa IIae  q.83 a 11 : « Si les saints qui sont au ciel prient pour nous ? »

[7] III a q. 35 a 1, 2, 5 ...

[8] III a q. 35 a 4 – St Albert dit que “la nativité en premier  et principalement regarde l’être de l’hypostase et de la personne et la nature en second, la Bienheureuse Vierge est dite mère du Christ selon l’hypostase , laquelle hypostase est Dieu et homme, et c’est pourquoi elle est Mère de Dieu et de l’homme ; bien qu’elle ne soit pas consubstantielle à Dieu, sinon quant à la nature humaine seulement, car la consubstantialité prise en elle-même ne signifie rien autre qu’une convenance en substance. La nativité appartient donc, en premier et par soi à la personne, et à la nature par voie de conséquence et en second ».

[9] IIIa q.2 a 5 ad 1 et 3ème livre des Sentences

[10] Pie XII, Munificentissimus Deus. Trad. de la Docum. Cath. 1950

[11] Ibid, Munificentissimus Deus  éd . Sol. P.144

[12] IIa – IIae, q. 164, a.1, ad 7m

[13] A la fin des temps : certains disent  « nous passerons à l’immortalité sans connaître la mort ». D’autres : « tous les hommes trouvés vivants devront mourir ». L’Eglise avec Thomas est favorable à cette deuxième hypothèse.

[14] Catéchisme 95-97 et en particulier dans ses discours en Equateur en 97

[15] C.E.C.  511